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29 juin 2012

Un printemps déchu, par André Nahum


Quelle chance devait être pour la région ce printemps arabe  au parfum de jasmin !
Les vieux dictateurs et les moins vieux, les Ben Ali, les Moubarak, les Ghaddafi, chassés par des jeunes idéalistes, avides de liberté, de justice sociale, de paix, quelle victoire pour la démocratie ! Ces foules immenses sur  la place Tahrir au Caire et l’Avenue Bourguiba à Tunis portaient en elles une immense espérance. Un nouveau Moyen-Orient et un nouveau Maghreb allaient surgir,  débarrassés de la corruption, du népotisme, de la mainmise policière grâce à ces manifestants dont le courage et l’enthousiasme forçaient notre admiration ! Ils ont vaincu. Ils se sont libérés tout seuls, sans armes,  sans aucune aide extérieure. L’avenir était à eux !

Du moins le croyaient-ils !
C‘était compter sans les Islamistes, tapis en embuscade en attendant leur heure. Et cette heure n’a pas tardé à arriver. Dieu est le plus grand ! Mieux structurés, mieux organisés, ils ont réussi à s’imposer par les urnes. Par un processus des plus démocratiques, Ennahda à Tunis, les « Frères Musulmans » au Caire, se sont emparés du pouvoir.

Quelle revanche sur ceux qui les ont combattus depuis  50 ans, depuis Nasser ! Comme toujours les révolutionnaires, les vrais, les purs,  se sont fait voler leur révolution.
Pas seulement par Ennahda et les Frères Musulmans qui officiellement se revendiquent d’un islamisme  modéré, mais aussi par des Salafistes bien plus extrémistes. Des gens qui réclament  l’application  de la Charia dans toute sa rigueur..
                       
Ils sont anti-occidentaux, anti-juifs, antichrétiens, anti-alcools, anti-arts, anti-musique et veulent priver les femmes des acquis dont elles bénéficiaient sous les régimes précédents pour les faire revenir au Moyen-âge. Tout prétexte leur est bon pour créer des troubles et plonger dans l’embarras les gouvernements en place, même s’ils sont eux-mêmes islamistes comme en Tunisie et en Égypte.

Cet Islam ultra-radical vole de succès en succès et multiplie ses conquêtes,  non seulement au Moyen-Orient  et au Maghreb mais aussi en Europe et en Afrique Subsaharienne où Al-Qaida vient de s’offrir un état dans la moitié  nord du Mali. Et le mouvement n’est pas près de s’arrêter. Au contraire.
                       
Face à cette offensive qui ne vise rien moins que de recréer le Califat, des voix encore peu nombreuses il est vrai, s’élèvent, surtout en Tunisie. Des femmes et des hommes,  des intellectuels, des écrivains, tels l’algérien Boualem Samsal, des peintres, n’hésitent pas à braver  les interdits qu’on veut leur imposer et les menaces de mort,  pour s’exprimer librement. Ils risquent gros et ils le savent.

Saluons leur courage et tenons les par la main.

André Nahum
Judaïques FM, le 27 juin 2012