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25 novembre 2011

L’Egypte de tous les dangers, par André Nahum


Des manifestations imposantes se déroulent quotidiennement à la place Tahrir du Caire, avec leur lot de morts et de blessés, pour exiger de l'armée qu’elle transfère immédiatement le pouvoir aux civils et dénoncer un projet qui permettrait aux militaires de garder des privilèges et de réduire les prérogatives  du nouveau parlement.
 
En effet, dans la crainte d'un raz-de marée islamiste aux législatives, les autorités ont annoncé, début novembre, vouloir mettre en œuvre une série de 22 principes "supra constitutionnels" qui feraient du Conseil militaire le "protecteur de la légitimité constitutionnelle de la nation", rapporte la correspondante du Monde au Caire, citée par le bulletin du CRIF. L'armée aurait le pouvoir de s'opposer à des articles de la nouvelle constitution. Mieux, "80 des 100 membres du comité chargé de rédiger la nouvelle constitution seraient nommés par le Conseil militaire et 20 seulement par le Parlement", tandis que le budget de l'armée resterait secret. Comme si, dit le New York Times le conseil de l’armée  proposait  "la garantie des droits individuels et de ceux des minorités contre une mainmise permanente de l'armée sur le régime" .          

Pourquoi cette agitation, au reste durement réprimée par le pouvoir en place, peu de jours avant les élections législatives qui doivent de dérouler le 28 novembre alors que l'armée, qui tient les rênes du pays depuis la démission de Moubarak, a promis de céder le pouvoir aux civils une fois un nouveau président élu ? A première vue ces manifestations suscitent la sympathie et un préjugé favorable des démocrates que nous sommes. Les Égyptiens ont renversé un dictateur, ils exigent maintenant que les militaires qui dirigent le pays rentrent le plus vite possible dans leurs casernes et cèdent la place à des représentants élus de la nation.                    
Rien de plus légitime et nous devrions nous en réjouir.
Mais... Il y a un “Mais”...
 Si les partis politiques qui s’affronteront au cours des prochaines élections, notamment les “Frères Musulmans” s’engagent formellement et d’un façon crédible à maintenir les acquis du peuple et notamment les droits des femmes, à ne pas remettre en question  les traités internationaux signés par les pouvoirs précédents, si l’on est assuré qu’ils acceptent sincèrement le principe de l’alternance, pourquoi pas ?
Mais la situation n’est pas aussi simple, les manifestants d’aujourd’hui ne sont pas tout à fait ceux d’hier.  Les islamistes et les salafistes, redoutant sans doute de voir se dérober un succès annoncé, ont dans un premier temps appelé leurs partisans à descendre dans la rue pour montrer une fois de plus, l'importance de leur capacité de mobilisation.

Hier, par contre, les “Frères Musulmans” ont annoncé officiellement qu’ils ne participeraient pas à la manifestation projetée, mais ce n’est probablement  que tactique et pour arriver au pouvoir, ils promettent tout ce qu’on veut et encore plus. Dans cette situation pour le moins confuse, on peut comprendre que l’armée et son chef, le maréchal Tantaoui, veuillent constituer une sorte de rempart contre une éventuelle tentation  du mouvement islamiste d’exercer un pouvoir sans partage et d’installer une république islamiste...et ce, au nom de la démocratie...   

 
André Nahum
Judaïques FM, le 23 novembre 2011