Rechercher dans ce blog

14 décembre 2009

Joyeux Hanouka, bonnes fêtes de fin d’année et … rendez-vous le 1er janvier !

Voici venu, chers lecteurs, le moment de prendre une nouvelle pause prolongée : des obligations personnelles, un petit voyage, mais aussi la nécessité de reprendre un peu mon souffle après un rythme fort soutenu ces derniers mois.

Le lectorat de ce blog est très divers, et bien que son « zoom » soit porté sur l’islam, on ne peut pas dire que les articles publiés soient centrés sur la religion, musulmane ou autre ... Ainsi, ai-je négligé la semaine dernière d’évoquer la fête de Hanouka, qui a débuté ce vendredi soir et qui dure huit jours : pour les lecteurs non juifs et curieux, se reporter sur le mot en libellé ci-dessous pour quelques explications ! Mais Hanouka, appelé aussi « la fête des lumières », tombe toujours en décembre et évoque d’autres lumières, celles-là de la fête de Noël puis du réveillon de la Saint Sylvestre - c’est donc un plaisir de présenter tous mes vœux à mes lecteurs juifs comme chrétiens : joyeuses fêtes à tous !

Quelques informations, également, en ce qui concerne mon émission. La période des fêtes de fin d’année voit traditionnellement une rediffusion, vous pourrez donc réentendre - ou entendre pour ceux qui l’auraient ratée - ma dernière interview de Mohamed Sifaoui, diffusée le 18 octobre (voir présentation sur ce lien). Ensuite, et comme « Rencontre » passe sur Judaïques FM les dimanches des semaines paires, la première émission de 2010 sera diffusée le 17 janvier : il s’agira d’une interview cette fois directement liée à l’actualité brûlante ... mais je vous en dirai plus d’ici là.
Sinon, le blog se met donc en sommeil, mais reprendra ses publications avant : le 1er janvier, normalement, pour accueillir ensemble la nouvelle année civile.

Bonnes fêtes amis lecteurs, et à bientôt !

J.C

13 décembre 2009

Minarets : l'Europe doit changer son regard sur l'islam, par Gilles Bernheim, Grand Rabbin de France

Le Grand Rabbin Gilles Bernheim

Toute décision qui aboutit à donner moins de droits aux fidèles d'une religion qu'aux fidèles d'une autre religion est une décision injuste. Ceci vaut en Suisse comme dans le reste du monde. Je suis contre l'interdiction de construire des minarets, qui a été votée en Suisse.
Quand on affirme un tel principe, il est nécessaire d'en poser le cadre. Loin de moi l'idée d'une surenchère de revendications particulières prenant pour seul argument le fait que la religion d'en face a plus ou mieux. Mon cadre est celui de la République, de la laïcité et de la Déclaration universelle des droits de l'homme qui prévoit, dans le même article, «la liberté de pensée, de conscience et de religion».
Chaque pays a une histoire religieuse. Vouloir balayer cet héritage serait un non-sens. En France, il y aura toujours davantage d'églises que de mosquées, synagogues et pagodes réunies. Ce qui est problématique dans la question posée aux Suisses, c'est la discrimination qu'elle instaure en autorisant la construction de clochers et de hauts édifices par les autres religions que l'islam. Jadis il est arrivé qu'on interdise aux juifs de construire des synagogues plus hautes que l'église : c'était défendre le principe d'une religion dominante, ce n'était pas déclarer l'autre religion indésirable.
Aujourd'hui, certains s'interrogent sur la conformité de la question posée avec des engagements internationaux signés par la Suisse. Mais si la question est viciée, alors pourquoi l'avoir posée ? La démocratie est-elle si mal en point que son paroxysme - l'initiative ou référendum populaire - puisse ainsi se tourner contre elle, sans quelqu'un pour bloquer la mécanique infernale ? L'affaire des minarets suisses a commencé en 2006, l'initiative populaire a été lancée en mai 2007 et les 100 000 signatures requises ont été déposées en juillet 2008.
Le «refus du minaret » demande à être analysé. Ce sera fait. On peut déjà envisager quatre motifs. D'abord une défense de l'identité chrétienne qui se trompe de méthode : remplir les églises serait plus utile que de réduire la visibilité des mosquées. Motif contraire, un refus du religieux : on ne craint plus l'église, bien discrète, on ne craint pas la synagogue, qui ne s'adresse qu'à son petit groupe. On craint la mosquée, réputée fervente et recruteuse.C'est le vieux «défense à Dieu d'entrer» que Victor Hugo attribue à Caïn après le meurtre de son frère, qui avait le premier rendu un culte. Motif plus obscur, sans doute plus fort : un vieux peuple qui n'a plus guère d'enfants se voit concurrencé sur sa terre par des nouveaux venus plus féconds. La crainte, enfin, d'une violence islamique à laquelle on fournit pourtant, par ce genre d'attitudes, des armes nouvelles.
Certains condamnent les résultats du vote et la majorité des Suisses qui auraient mal voté. Je pense, au contraire, que l'opinion des Suisses doit être entendue même si, encore une fois, je suis en désaccord avec elle. Nous, autorités de toutes religions, mais aussi les pouvoirs publics et les journalistes avons failli à notre mission de dialogue, de lutte contre les préjugés et de construction d'un avenir commun.
Il serait déplacé de dresser ici la liste des actions menées en France pour le dialogue. De toute façon, on ne dialogue jamais assez et on ne va jamais assez au devant de l'autre. Mais encore faut-il que l'autre ouvre sa porte et qu'il souscrive au cadre républicain. Et aussi que le curé, l'imam ou le rabbin soit le bienvenu dans les lieux de culte qui ne sont pas les siens. Soyons honnêtes et lucides, de grands progrès sont ici à accomplir.
D'autres, encore, ont agité le spectre d'un retour de bâton qui pourrait venir des pays où l'islam est majoritaire ou religion d'État. Les scènes de rue et les débordements de violence qui ont suivi la publication de caricatures par un magazine danois, sont désormais ancrés dans un inconscient collectif. Si elle devenait réalité, la menace d'un retour de bâton ne ferait que renforcer les convictions des Suisses qui ont voté pour l'interdiction. Et elle aurait le même caractère injuste que le vote suisse.
Depuis dimanche, les sondages se multiplient sur Internet, en France et dans les autres pays. Même si l'instrument est imparfait, l'approbation du vote suisse y est majoritaire. Et parmi les minoritaires qui désapprouvent le vote suisse, il en est toujours qui ajoutent dans la même phrase qu'ils ne sont pas, pour autant, favorables à la construction de minarets.
Aujourd'hui, il nous faut agir afin que les Européens - et pas seulement les Suisses - changent d'opinion sur l'islam. Cette obligation vaut pour les responsables de toutes les religions. Elle nécessite dialogue et ouverture. Une partie de l'action est à mener ici en Europe. Une autre partie est du ressort des pays musulmans. Il serait illusoire d'espérer ici des résultats massifs, sans changement visible là-bas.

Grand Rabbin Gilles Bernheim,
« Le Figaro », 2 décembre 2009

11 décembre 2009

MOSAIC, une nouvelle Fédération musulmane à suivre

Introduction :
Je publie, avec un peu de retard, un communiqué de presse annonçant le premier colloque de MOSAIC, la « Fédération Nationale Laïque des Citoyens de Sensibilité Musulmane ». « Sensibilité musulmane », tout est (presque) dit dans cette appellation, dans la mesure où elle regroupe des citoyens d’abord français, et qui voient dans leur religion d’origine soit une foi personnelle, soit une culture s’ils ne sont pas croyants, mais certainement pas un programme politique, comme le voudraient les Tariq Ramadan et autres agitateurs ...
Sans surprise, j’ai retrouvé parmi les intellectuels ayant soutenu cette initiative et devant participer au colloque de Nice, plusieurs anciens invités de mon émission : Mohamed Abdi ; Ghaleb Bencheikh ; Dalil Boubakeur ; Dounia Bouzar ; Mezri Haddad ; Rachid Kaci. Sans surprise, aussi, la Fédération MOSAIC et le CRIF ont déjà pris contact, et on peut espérer que cela permettra d’établir une nouvelle « passerelle » entre Juifs et Musulmans dans notre pays !

J.C

Paris, le 9 octobre 2009

COMMUNIQUE DE PRESSE

Née le 1er juin 2009 après deux ans et demi de gestation, MOSAÏC, la Fédération Nationale Laïque des Citoyens de Sensibilité Musulmane organise le 31 octobre prochain de 8h30 à 18h son premier grand colloque National sur le thème:«Citoyenneté et Français de sensibilité musulmane: Ensemble, changeons la donne !»« 15 intervenants feront un état des lieux concernant la situation de ces 6 millions de citoyens français. Nous débattrons également des meilleures pistes d'actions, de nouvelles idées et de notre méthodologie pour faire évoluer les mentalités, le quotidien et le Mieux Vivre ensemble dans la République. » indique le Dr Marouane Bouloudhnine, Président National de Mosaïc .

Parmi les femmes et hommes d'actions ayant répondu favorablement à cette initiative, on note la présence de Abdel Aïssou, Président du Conseil national des entreprises pour la banlieue et Directeur Général délégué de Randstad, Mohamed Abdi, Conseiller spécial de Fadéla Amara, secrétaire d'Etat chargée de la Politique de la ville, Michel Auboin, Directeur de la Direction de l'Accueil, de l'Intégration et de la Citoyenneté, Ghaleb Bencheikh, Président de la Conférence mondiale des religions pour la paix, Emmanuel Bertin, Responsable de l'Agence nationale pour la Cohésion Sociale et l'Égalité des chances, Dalil Boubakeur, Recteur de la Grande Mosquée de Paris, Dounia Bouzar, Anthropologue du fait religieux, Fayçal Douhane, Directeur Général Adjoint de l'Association des Maires d'Ile de France, Mezri Haddad, Ecrivain et philosophe, Rachid Kaci, Sous Préfet, Bariza Khiari, Sénatrice, Fadila Méhal, Présidente des Marianne de la diversité, Eric de Montgolfier, Procureur de la République, et Aziz Senni, Président Fondateur du fond d'investissement Business Angel des Cités.Placé sous le haut patronage de Christian Estrosi, Ministre chargé de l'industrie, Maire de Nice et Président de Nice Côte d'Azur, ce premier colloque doit servir de « think-tank » pour Mosaïc et les membres de ses 23 bureaux régionaux. Il permettra notamment de définir ses actions prioritaires futures.

« Laïque, culturelle et apolitique, Mosaïc oeuvre dans un esprit démocratique, d'ouverture et de tolérance, pour une démocratie apaisée. Nous ne souhaitons plus voir notre image bafouée. Les actions de Mosaïc, locales ou nationales, sont avant tout centrées sur la promotion de la citoyenneté, le respect des valeurs républicaines, l'image des citoyens de sensibilité musulmane, et l'égalité des chances quant à l'accès à l'emploi, à l'éducation, la formation et l'emploi. » explique encore Fouzi Bettache, Secrétaire Général National de Mosaïc.

Ce Colloque, l'une des premières actions menées au niveau national par Mosaïc, est gratuit et ouvert à tous. Il se tiendra au Centre Universitaire Méditerranéen de Nice (65 promenade des Anglais)

La presse et les leaders d'opinion français pressentent unanimement que la naissance et le développement de Mosaïc signe le point de départ d'une nouvelle façon de parler des citoyens de sensibilité musulmane, qu'ils soient originaires d'Afrique, du Moyen-Orient, du Maghreb, de Turquie, d'Europe ou d'ailleurs, comme en attestent les nombreuses retombées médiatiques obtenues depuis juin.

Le site internet de Mosaïc ( http://www.federationmosaic.com/ ) donne plus de détails sur la fédération elle même, et sur ce colloque en particulier, et notamment sur les horaires des 4 tables rondes organisées le 31 octobre.

Direction de la Communication
Mosaïcpresse@federationmosaic.com

09 décembre 2009

Minarets en Suisse : respecter l'architecture locale !

Dessin de Dilem

Le sourire du mois
- décembre 2009

Merci à mon amie Sylvie R. pour m'avoir signalé ce dessin du talentueux chroniqueur algérien Dilem ... des minarets tout à fait suisses, il suffisait d'y penser !

J.C

07 décembre 2009

Au nom de la fraternité arabe : comment les Algériens ont fui l’Egypte

Joueur algérien après son agression en Égypte

Introduction :
Je publie avec un peu de retard cet article envoyé par mon ami de Tunis, Souhail Ftouh, après les incidents très violents entre Egyptiens et Algériens, au moment du premier tour de qualification pour le « Mondial » de football 2010. On se souvient, en effet, que l’équipe d’Algérie et ses supporters avait été agressés à coups de pierres lors de leur déplacement au Caire. La défait algérienne, le samedi 14 novembre, avait ensuite donné lieu à des manifestations violentes et à des destructions dans notre pays, surtout à Marseille, avant que le sort ne bascule à nouveau avec une victoire algérienne au Soudan - ce qui allait inspirer, à nouveau, à des manifestations de rue et des embouteillages monstres de supporters dans les villes françaises : manifestations avec drapeaux algériens que je trouve bien maladroites à l’heure où « l’identité nationale » fait débat, mais c’est un autre sujet ... Ne pensons ici qu’à l’hypocrisie de la « fraternité arabe », courageusement dénoncée par l’auteur de l’article !
J.C

Une centaine d’étudiants algériens résidant en Égypte ont décidé de fuir, traumatisés par les vexations et les menaces dont ils font l’objet depuis la qualification, au détriment de la sélection égyptienne, de l’Algérie pour la prochaine Coupe du Monde de football, rapporte le quotidien algérien El-Watan. Le 12 novembre, les supporters locaux avaient accueilli avec des pierres les joueurs de l’équipe d’Algérie venue disputer un match décisif au Caire. Une rencontre supplémentaire, organisée au Soudan, a finalement vu les « Fennecs » se qualifier.
Depuis, les Algériens installés en Égypte en subissent les conséquences. Selon le journal, des ressortissants algériens ont également été humiliés au moment de leur départ à l’aéroport. Certains racontent avoir subi deux séances de fouille corporelle d’affilée avant de pouvoir monter dans l’avion. Déshabillées et laissées nues pendant plusieurs minutes, des femmes auraient été « tripotées » par des policiers égyptiens. Et le personnel de l’aéroport aurait refusé d’acheminer les bagages des passagers algériens jusqu’à l’appareil, en les obligeant à les porter eux-mêmes sur le tarmac.

Néanmoins, une centaine d’étudiants qui se trouvaient en Égypte sont arrivés lundi à l’aéroport Houari Boumediene, à bord d’un vol de la compagnie nationale Air Algérie, à 21 heures. Les familles des étudiants ont fait le déplacement à l’aéroport pour accueillir leurs proches. Des femmes ont lancé des «youyous» en voyant leurs enfants sains et saufs. Les étudiants étaient encore sous le choc de ce qu’ils venaient de vivre en terre égyptienne.
Ils en avaient gros sur le cœur, depuis le fameux match Égypte - Algérie du 14 novembre dernier. Aïcha et Malika, deux étudiantes à l’institut d’études arabes et de la recherche du Caire, racontent leur calvaire et celui vécu par tous les étudiants qui sont actuellement en Égypte :
«Les étudiants algériens sont interdits d’accéder aux universités égyptiennes», témoigne Aïcha, en ajoutant que des chercheurs algériens en stage en Égypte ont été pourchassés par les responsables des instituts et des universités. Malika raconte que même les propriétaires de logements loués n’ont pas hésité à se joindre à l’hystérie collective en Égypte, en procédant à l’expulsion de leurs clients algériens sans aucun remboursement. «Même les commerçants refusent de vendre quoi que ce soit aux Algériens », relate encore Malika, en soulignant que ce sont des étudiants palestiniens qui ont volé au secours des étudiants algériens, notamment pour les achats ou pour les déplacements. «Ce sont nos amis palestiniens qui nous ont assuré le déplacement du lieu Maâdene jusqu’à l’aéroport». Selon certains témoignages, les étudiants algériens changent de quartier et se faisant passer pour des Tunisiens, Marocains, Palestiniens pour ne pas être agressés. B.Zerzour, un autre étudiant, a affirmé qu’il a été contraint de fuir l’Égypte en raison des pressions. Pourtant, dit-il, «je devais soutenir mon mémoire juste après l’Aïd El-Adha».
Ne supportant plus les comportements de certains Égyptiens et les humiliations, un maître assistant de l’université Ahmed Khider de Biskra, de retour à Alger, a juré de ne plus remettre les pieds en Égypte. «Si on déplace La Mecque en Égypte, je n’accomplirai pas le Hadj», a-t-il indiqué en affirmant qu’il a été jusqu’à parler le dialecte égyptien de la rue Abdine jusqu’à l’aéroport pour sauver sa peau. Une étudiante résidant au Caire a affirmé avoir reçu des appels anonymes, avec menaces de mort et injures contre sa personne et contre l’Algérie, et ce avant le match du samedi 14 novembre. Les différents témoignages recueillis auprès des étudiants font état de harcèlement moral, d’escroquerie et d’humiliations de chercheurs algériens par des responsables des universités égyptiennes.

Le comble, selon nos interlocuteurs, est que les services de sécurité égyptiens se contentaient de les recenser seulement en affirmant qu’ils maîtrisaient le situation. Pour ce qui est des agressions physiques, les étudiants rencontrés, avant-hier, ont affirmé que certains ont été agressés à El Djiza, à El Maali, mais sans gravité. Ils ont affirmé que les cas les plus graves sont ceux de deux étudiants agressés à l’arme blanche par des Égyptiens au Caire. «Ces derniers sont pris en charge par notre ambassade en Égypte», ont-ils affirmé.

Les étudiants ayant fui l’Égypte sont porteurs d’un message, plutôt d’un appel aux autorités algériennes pour aider des étudiants sans ressources à rentrer au pays. «Une quarantaine d’étudiants sont coincés au Caire et en Alexandrie », témoigne une étudiante. Elle explique que certains étudiants n’ont pas les moyens de se payer un billet pour le moment vu que leur bourse est bloquée pour des procédures de routine. Elle ajoute que ces étudiants sont dans l’incapacité de se rendre jusqu’à l’ambassade par peur d’être attaqués. Nos interlocuteurs ont également fait état d’étudiants coincés à El Maali. «Ils sont à 9 et 10 dans des appartement loués, après avoir été chassés par certains propriétaires qui leur avaient loué des appartements. Et avec la peur d’être encore une fois expulsés», relatent des étudiants encore sous le choc. Et d’affirmer que les étudiants qui sont encore coincés en Égypte demandent l’intervention des autorités algériennes pour qu’ils rentrent au pays.

Humiliations à l’aéroport du Caire

Les étudiants arrivés avant-hier ont affirmé par ailleurs avoir été humiliés par des agents de sécurité de l’aéroport du Caire : «On a été fouillées, nous et nos bagages à deux reprises», ont affirmé Aïcha et Malika en ajoutant que «des agents ont pris nos parfums, déodorants, dentifrices et même nos brosses à dents».
Une mère de famille ayant accompagné son mari en stage de deux ans a affirmé que des agents de l’aéroport ont vidé le sac à dos, contenant du chocolat de sa petite fille en la laissant hurler devant tout le monde, sous prétexte que c’est du chocolat produit en Égypte ! Une étudiante a témoigné qu’un magasin d’artisanat au sein de l’aéroport a affiché une pancarte sur laquelle est écrit: «les Algériens sont interdits d’entrer au magasin». Un entrepreneur syrien arrivant du Caire à Alger, a connu le même sort que les Algériens. «Ils m’ont demandé que vas-tu faire dans ce pays de chiens ? J’ai répondu que l’Algérie est le pays d’un million et demi de chahids». Il poursuit: «Ils m’ont traité comme les étudiants algériens en me fouillant. Ils ont même jeté mes bagages et ils m’ont piqué les objets qui étaient dans ma trousse de toilette». Étonné, il poursuit, «ils ont même pris mon dentifrice !». Le Syrien a affirmé que «une fois qu’on a franchi les postes de contrôle, nous avons tous répété « Tahya El Djazaïr».

Cette chasse aux Algériens n’a pas épargné aussi un joueur d’origine algérienne (pourtant lié par un contrat avec un club égyptien), qui a quitté l’Égypte sous des menaces de morts
Finalement, le Ahly du Caire a consenti à laisser partir son jeune joueur d’origine algérienne, Amir Saâyoud. En effet, la section football du club égyptien, qui s’est réunie le 24 novembre, a finalement décidé de se séparer de son joueur sur demande de celui-ci, après les menaces de mort dont il avait fait l’objet ces derniers jours. Il faut dire que cette issue était inévitable dès lors que la situation est devenue insupportable pour cet Algérien qui s’est recroquevillé dans son domicile depuis la qualification de l’Algérie par peur de représailles.
Des voix se sont levées pour exiger du Ahly la résiliation du contrat de son joueur algérien, recruté cet été, et son extradition en Algérie. Et il semble bien que l’offre du club belge du FC Lierse tombe à point nommé pour les deux parties qui n’ont pas hésité longtemps avant de convenir d’un transfert. Tout est donc fait pour que Amir Saâyoud rejoigne dans les jours à venir le club belge. Tout est aussi fini entre l’Algérien et son club : «Je ne pouvais accepter qu’on touche à ma dignité» a-t-il dit
Cette chasse aux Algériens, humiliation et agression montre bien que la fraternité arabe est une farce. Le paradoxe des pays arabes est que c'est dans les moments de crises hystériques (contre Israël par exemple) ils donnent l'impression d’êtres unis, alors qu’en réalité la fraternité arabe est une utopie. C’est une grosse utopie puisque en dehors de la haine d’Israël les Arabes ne partagent rien d'autre.

Ftouh Souhail,
Tunis

06 décembre 2009

Soufis, Ismaéliens et confréries : Christian Lochon sera mon invité le 13 décembre

Le Professeur Christian Lochon

Dimanche prochain, nous allons poursuivre notre évocation d’un petit livre aussi original que passionnant, dont nous avions déjà parlé le 29 novembre. Ce livre c’est « Secrets initiatiques en Islam et rituels maçonniques », avec en sous-titre « Druzes, Ismaéliens, Alaouites et confréries soufies », ouvrage publié aux éditions L’Harmattan. Et mon invité sera à nouveau Christian Lochon. Rappelons qu’il a été attaché culturel dans plusieurs pays d’Afrique et du Proche Orient, directeur des études au C.H.E.A.M (Centre des Hautes Études sur l’Afrique et l’Asie Moderne), et surtout que c’est vraiment un « orientaliste de terrain », ayant vécu dans plusieurs pays du Moyen-Orient. Rappelons aussi qu’il cosigne ce livre avec Jean-Marc Aractingi, lui aussi Orientaliste et ancien diplomate, mais qui connaît parfaitement la franc-maçonnerie puisqu’il a appartenu à plusieurs loges, et justement nous évoquerons ses branches dans le monde arabe. La dernière fois, nous avions évoqué assez longuement les Druzes, nous avions parlé aussi des Alaouites ; nous allons parler cette fois-ci des Ismaéliens, autre « rameau » de cet « arbre chiite » que nous avions évoqué, et qui a donné naissance à plusieurs communautés religieuses de la région. Mais nous parlerons, aussi du Soufisme, et puis des confréries, loges et corporations diverses qui existent au Moyen Orient, et qui ont tissé des liens de solidarité séculaires dans les élites de ces sociétés : comme écrit en introduction, le monde musulman traverse une crise profonde actuellement, et nous verrons ensemble si ces différentes corporations, plus ou moins secrètes, peuvent l’aider à « sortir par le haut » ces différents pays, surtout à un moment où l’islam radical semble s’incruster et se développer, hélas profondément, dans les couches populaires.

Parmi les questions que je poserai à Christian Lochon :

- A propos du Soufisme : est-ce que c’est une recherche syncrétique, une recherche de fusion des croyances ? Ou alors plus simplement une vision pacifique des relations humaines ?
- Page 21 sont donnés des chiffres étonnants : un Soudanais sur trois et un Egyptien sur dix fait partie d’une confrérie soufie. On est un peu étonné, connaissant l’importance des Frères Musulmans en Egypte et le fait que les islamistes soient au pouvoir à Khartoum, or on sait que les valeurs soufies sont profondément humanistes : qu’en penser ? Et est-ce qu’il n’y a pas le risque, aussi, que des radicaux s’infiltrent dans ces confréries pour les noyauter ?
- A propos du concept de « Futuwwa », qu’on pourrait traduire par « esprit chevaleresque », le livre montre les croisements étonnants entre les cultures de part et d’autres de la Méditerranée : est-ce qu’on peut dire vraiment que l’on a eu une longue influence vers plus de raffinement qui aurait traversé les siècles et les continents, depuis la Perse préislamique jusqu’à l’Europe, en passant par le Proche-Orient ?
- Tout le monde connaît la figure de l’Agha Khan, et toutes ses fondations humanistes : les Ismaéliens peuvent-ils être considérés comme des alliés potentiels pour réconcilier l’islam et la modernité, ou sont-ils « grillés » parce que considérés comme hérétiques ?
- La franc-maçonnerie a été un lieu d’échanges entre communautés religieuses différentes, dans les anciennes colonies et à la fin de l’Empire Ottoman ; mais aujourd’hui, les régimes autoritaires verrouillent presque partout les loges : les musulmans libéraux s’y retrouvent parfois, et ils sont dénoncés par les islamistes radicaux : peuvent-elles avoir à l’avenir une influence sur l’évolution des sociétés arabes ?

Soyez nombreux à l’écoute dimanche prochain !

J.C

03 décembre 2009

Votation suisse sur les minarets : sept réflexions et beaucoup de fantasmes


Le vote surprise de dimanche dernier en Suisse, qui a vu une nette majorité d’électeurs (57 %) se prononcer en faveur de l’interdiction de la construction de minarets, a fait l’effet d’un coup de tonnerre dans le ciel faussement serein de notre vieille Europe : nouveau « clash » concernant l’islam, et son implantation de plus en visible dans notre continent ; coup de projecteur donné à un petit pays, dont les idées reçues nous disent qu’il est à la fois neutre et sans histoires ; craintes devant la percée d’un parti populiste (l’UDC, Union Démocratique du Centre), dont on nous dit qu’il est le pendant local du Front National ; protestations internationales, de la part des Musulmans, mais aussi du Vatican et du Conseil des Droits de l’Homme de l’ONU, protestant contre une limitation de la liberté religieuse dans la Confédération Helvétique ... qui craint des représailles en retour ; reprise du débat sur les minarets en France, avec rapidement et à la fois, un message un peu brouillé de la part des responsables de l’UMP, eux-mêmes dans la logique d’un autre débat - celui de l’identité nationale - qui est déjà rejeté par la Gauche ; gauche qui (en Suisse, chez nous et dans toute l’Europe) dénonce partout tout ce qui peut « stigmatiser les Musulmans » ; soutien du Front National au vote suisse, qu’il convient peut-être de décoder car on l’a connu récemment plus accommodant vis-à-vis de l’islamisme, soit disant dénoncé par son « parti frère » ; une prise de position du CRIF qui est mal comprise par une partie de la « rue juive » ; enfin, et à propos de cette votation suisse, un flot de commentaires lus sur tous le forums de discussion, et qui témoignent d’une large ignorance du sujet.


Cela fait beaucoup d'agitation, à propos d'un modeste réferendum sur le minaret, que le grand et regretté écrivain algérien Kateb Yacine comparait "à une fusée qui ne décolle jamais" !
Essayons de désembrouiller le débat en apportant un certain nombre de précisions.

1. Le minaret chez nous n’est pas le symbole d’un islam conquérant

La plupart des commentaires lus sur les sites des journaux - et plus modestement, sur ma page Facebook où j’avais lancé le débat - reviennent sur l’envahissement de notre espace laïc par les mosquées, la peur que l’appel du muezzin ne vienne troubler la tranquillité des riverains plusieurs fois par jour, et plus symboliquement que cette architecture, étrangère aux traditions de l’Europe, ne vienne partout envahir le paysage, rendant encore plus visible une expansion démographique des minorités musulmanes. Est rappelée, à cet égard, la terrible déclaration du Premier Ministre turc Erdogan, lorsqu’il n’était encore que le leader de son parti islamiste « modéré » : « les mosquées sont nos casernes, les coupoles, nos casques, les minarets, nos baïonnettes, et les fidèles (musulmans), nos soldats ».
Or, il convient ici de rappeler que - au moins pour notre pays - l’appel à la prière du haut des minarets est strictement interdit (comme est réglementé l’usage des cloches dans les églises), et que les constructions de mosquées font l’objet d’autorisations municipales, avec des limites strictes en ce qui concerne la hauteur des minarets - les plus récents ne dépassent pas 25 m, le plus haut restant celui de la Grande Mosquée de Paris construite dans les années 20 (lire cet article publié par "Le Point"). Par ailleurs, seules 1 % des mosquées sur notre territoire auraient des minarets, qui ont donc un rôle plus décoratif que cultuel : Xavier Bertrand avait donc raison de dire qu’ils ne sont pas indispensables à l’exercice du culte musulman - même si l’UMP s’est ensuite vite rangée à l’avis du «politiquement correct » général en dénonçant l’interdiction suisse des minarets ... minarets qui eux-mêmes sont fort peu nombreux parmi les centaines de mosquées existant déjà dans la Confédération !

2. Le CRIF a eu raison de déplorer les résultats du vote

Ainsi donc se trouve totalement justifiée la prise de position du CRIF qui « déplore la votation suisse » (lire le communiqué) : que pouvait-on attendre de la part de la représentation politique de la communauté juive organisée, communauté qui ne peut se référer en France que par rapport à une appartenance confessionnelle ? Qu’elle soutienne une mesure vexatoire, prise à l’encontre des musulmans d’un pays voisin ? Qu’elle fasse semblant de croire que la laïcité est menacée par les minarets, alors que ce n’est pas exact ? Qu’elle se range du côté du seul parti politique français qui se réjouisse de ce vote, parti d’extrême droite dont le leader a été condamné à plusieurs reprises pour antisémitisme, et sympathisant en plus ... de l’Iran, la puissance islamiste internationale qui nous menace tous et de plus en plus - et là il ne s’agit pas de fantasmes, ni en ce qui concerne le F.N, ni en ce qui concerne les Ayatollahs.
« Marine Le Pen = anti-arabe, Arabes = antisémites », voilà les axiomes qui hélas font de plus en plus de ravages dans la « rue juive » et qui aboutissent parfois à l’équation « Front National = gentils ».

3. La campagne de l’UDC était clairement raciste

Je ne vais pas lourdement insister sur l’affiche qui explique le succès inattendu du « oui » à ce référendum, illustration reprise pour illustrer cet article et qui réunit, avec beaucoup de talents, quelques uns des fantasmes expliquant le vote : hauts minarets de style ottoman, symbolisant peut-être une Turquie effectivement de plus en plus inquiétante, mais aussi inclinés comme des missiles (et là, on pense aux Scuds et à l’Iran !) ; femme voilée, qui symbolise l’intégrisme musulman, et donc mélange de deux débats car il n’était pas question de voter pour ou contre la burqa ! En clair, une campagne à la fois astucieuse et malhonnête, car la crainte légitime de l’islamisme a rallié les suffrages de beaucoup de Suisses. Il n’est peut-être pas inutile de rappeler, enfin et à l’attention des lecteurs juifs de cet article, que l’UDC est un parti populiste, anti-européen, et qui a mené des campagnes (contre les étrangers, contre les homosexuels, etc.) qui devraient mettre mal à l’aise tous les démocrates.

4. Le malaise des Suisses vis-à-vis du monde musulman est réel mais le vote est paradoxal

Le succès des partis populistes, dans la Confédération comme dans l’Europe du Nord (Pays Bas, Danemark) s’explique aussi par l’arrivée de centaines de milliers de musulmans dans des contrées où cette minorité était quasi inconnue : en Suisse, par exemple, ils sont 400.000 soit plus de 5 % de la population. Cependant, un examen plus fin des résultats montre aussi que les populations qui vivent le moins à leur contact - dans les campagnes - ont voté le plus en faveur du « oui », alors que Genève - où on note un afflux d’originaires du Maghreb en provenance de la France, suite à « l’effacement » de la frontière - a voté non (lire ici). Ceci permet de relativiser à la fois les commentaires « bien pensants » de la gauche, ou « simplistes » de l’extrême droite : accuser les Suisses d’être tous devenus des racistes est absurde, car leur vote n’a pas été homogène, et n’a visé que la symbolique (le minaret) et pas la liberté du culte (on n’a pas interdit la construction des mosquées) ; curieusement, ceux qui vivent le plus à leur contact n’ont pas voté en majorité comme on l’aurait attendu ; enfin, la Suisse alémanique qui a voté en majorité « oui » est aussi celle où les sondages d’opinion identifient clairement un antisémitisme récurrent, et plus récemment un rejet d'Israël important - encore un point à méditer par mes lecteurs juifs réjouis par cette « votation » !

5. La votation suisse exprime aussi un malaise par rapport à des épisodes diplomatiques récents

Pratiquement, aucun article de presse ne rappelle les épisodes récents qui ont vu la diplomatie helvétique pratiquer des courbettes à répétition devant les pires spécimens d’un islam politique méchant et agressif, qu’il s’agisse de Kadhafi qui retient toujours en otage deux ressortissants suisses et prétend démanteler leur pays (lire sur mon blog), ou d’Ahmadinejad, à qui la « Cheffe » des Affaires Etangères a rendu visite, voilée et tout sourire (lire aussi ceci sur le blog). Quel est le pourcentage d’électeurs qui a voulu exprimer leur dégoût par rapport à ces évènements récents, en votant sur un tout autre sujet ? On ne le saura jamais, mais le silence de nos médias rend aussi mal à l’aise : tout est ramené à un débat sociétal sur l’islam en Europe, et on oublie trop que « le monde est un village » !

6. Beaucoup de réactions sont hypocrites

Autant je ne me réjouis pas de voir une partie de la « rue juive » reprendre des slogans de l’extrême droite, autant je trouve aussi parfaitement justifié son écœurement devant les indignations sélectives d’un grande partie de la gauche et du « politiquement correct » : s’indigner de soit disant persécutions anti-musulmanes en Europe ou de menaces imaginaires contre l’exercice de leur religion, alors qu’on maintient un silence de plomb à propos de l’interdiction des Eglises en Arabie Saoudite ou en Algérie, ou face aux massacres (Soudan) ou aux expulsions (Irak) de centaines de milliers de Chrétiens en terre d’islam - sans parler, bien sûr, de la quasi élimination des communautés juives dans ces pays -, est tout à fait insupportable : et que Navi Pillay, la présidente du sinistre « Conseil des Droits de l’Homme » de l’ONU en ait « rajouté un couche » n’est ni étonnant, ni moralement supportable quand on connaît le silence de ces instances vis-à-vis des pires persécutions de la Planète : réentendre à ce sujet, mes interviews d'il y a quelques mois de Malka Marcovich, grande spécialiste de la dérive morale des ces institutions ...

7. Une réflexion de fond s’impose pour ne pas laisser à l’extrême droite le monopole de la gestion de l’islam politique

Je ferai très court, pour conclure, en vous recommandant la lecture d’un article publié sur le blog de Nadia Geerts : lire ici.
Cette militante belge de la laïcité, très engagée contre l’islam radical et ses menaces contre nos sociétés démocratiques, n’a jamais basculé dans la stigmatisation de l’islam ou - pire encore - des populations musulmanes dans leur ensemble. Elle rappelle quelques vérités dans cette publication, le fait que l’on peut comprendre le sentiment de peur de beaucoup d’Européens, mais qu’il n’excuse pas tout et n’importe quoi, comme justement ce vote sur la construction des minarets ...

 Jean Corcos

02 décembre 2009

Israël - Iran : la guerre de l'ombre

Missiles découverts sur le cargo "Francop"
arraisonné par la marine israélienne

Israël mène une guerre secrète contre Téhéran. Faute de pouvoir attaquer directement avec son aviation les installations atomiques iraniennes, l'État hébreu tente par tous les moyens de retarder le programme nucléaire de la république islamique. Le dernier épisode de cette bataille de l'ombre, où tous les coups sont permis, s'est déroulé la semaine dernière au large de Chypre lorsqu'un commando d'élite de la marine israélienne a intercepté un navire parti d'Iran transportant plusieurs dizaines de tonnes d'armes destinées au Hezbollah libanais.
En règle générale, l'affrontement reste beaucoup plus discret, le «dossier» iranien étant géré par Meïr Dagan, le patron du Mossad. À la tête des services secrets, ce partisan de la manière forte privilégie l'action plutôt que l'analyse. Sa mission est on ne peut plus claire : recueillir le maximum de renseignements sur la localisation des sites utilisés pour l'enrichissement de l'uranium afin de pouvoir, si nécessaire, lancer des raids aériens, comme celui qui avait permis à l'État hébreu de détruire la centrale nucléaire irakienne Osirak près de Bagdad en 1981. En attendant l'application éventuelle de ce scénario, Meïr Dagan recourt à une tactique de harcèlement.
Parmi les stratagèmes utilisés figurent, selon des experts en matière de renseignements, la création ou la prise de contrôle d'entreprises en Europe spécialisées dans la fourniture de matériaux «à double emploi», c'est-à-dire pouvant servir à des fins civiles mais aussi pour le programme nucléaire iranien (machines-outils, équipements électroniques, métaux spéciaux). Une fois la confiance créée, le fournisseur envoie à ses clients des équipements défectueux capables de déclencher des dégâts en chaîne, par exemple dans les centrifugeuses utilisées pour enrichir l'uranium. Les agents israéliens sont également experts dans l'art du sabotage des ordinateurs et l'infiltration de virus informatiques dans des réseaux pour provoquer des pannes, effacer des mémoires ou introduire de fausses données.
Satellites et sous-marins
Une autre méthode moins sophistiquée consiste à détruire ou endommager du matériel destiné à l'Iran dans les ports européens ou à utiliser des commandos lorsque la cargaison suspecte se trouve déjà en pleine mer. Plus expéditif encore, le Mossad s'est vu attribuer des éliminations de scientifiques de haut rang liés au programme nucléaire iranien. En 2007, un de ces experts, Ardeshire Hssanjour, a mystérieusement été empoisonné.
Le Mossad déploie aussi une tactique «périphérique» pour frapper les alliés de l'Iran qui pourraient constituer un danger pour Israël en cas de conflit armé avec Téhéran. Le Hezbollah ainsi que la Syrie sont spécialement dans le collimateur. Les services secrets israéliens sont ainsi suspectés d'
un attentat à la voiture piégée à Damas qui a coûté la vie à Imad Mughniyeh, le chef de la branche militaire de la milice chiite libanaise, en février 2008. En septembre 2007, l'aviation israélienne a détruit en Syrie, près de la frontière irakienne, une centrale atomique construite secrètement par la Corée du Nord. À titre d'avertissement, Tsahal n'a pas hésité à frapper jusqu'au Soudan en mars de cette année lorsqu'un convoi de 17 camions transportant des armes iraniennes
- apparemment destinées au Hamas - a été attaqué par des avions ou des drones de nationalité inconnue.
Pour compléter le tableau, Israël a mis sur orbite plusieurs satellites espions qui surveillent constamment l'Iran. Sur le front maritime, l'État hébreu dispose de plusieurs sous-marins fournis par l'Allemagne, qui peuvent, selon des experts étrangers, atteindre les côtes iraniennes pour des missions de surveillance, tout en transportant à leur bord une force de dissuasion : des missiles de croisière à tête nucléaire.
Marc Henry,
« Le Figaro », 10 novembre 2009