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27 avril 2009

Conférence de Genève : 2/3, Une ambiance meilleure qu'on pouvait le craindre

Elie Wiesel manifestant contre Ahmadinejad, Genève le 20 avril 2009

Manifestation pour le Darfour sur la place des nationsface à l'ONU, Genève le 21 avril 2009 (photo Jean Corcos)
Deux femmes islamistes portant une pancarte "antisioniste", 
entrée du Palais des Nations

Faut-il le rappeler ? Tout le monde craignait de retrouver à Genève la même ambiance délétère que lors de la précédente conférence contre le racisme de Durban, en septembre 2001 : comme le rappelle Malka Marcovich dans son livre « Les nations désunies. Comment l’ONU enterre les droits de l’homme », la réunion des ONG en marge de la conférence des droits de l’homme avait donné lieu à un véritable « pogrom » ... ci-dessous, un extrait :
« Car en effet à Durban, l’antisémitisme des déchaîne sans complexe : exposition de dessins antisémites dignes des années trente, diffusion des « Protocoles des sages de Sion », de « Mein Kampf », agressions des personnes identifiées comme juives, appel au meurtre des juifs dans un stade de deux mille personnes enthousiastes à l’issue du discours fleuve de Fidel Castro ».
Et bien, force est de constater que Genève ne fut pas Durban ! Certes, les antisionistes radicaux, pseudo ONG iraniennes et militants pro palestiniens extrémistes étaient bien là, reconnaissables à leur tenue : femmes enveloppées dans des noirs tchadors flottants telles des Belphégor, porteurs de tee-shirts où une carte de la Palestine effaçait intégralement l’état juif, porteurs de pancartes assez explicites - voir photo du bas ; nous en avons croisés quelques spécimens dans les couloirs et à la cafeteria. Autres rencontres sinistres, trois « Netoureï Karta », cette secte juive orthodoxe ultra-antisioniste, qui escorte régulièrement Ahmadinejad dans ses déplacements onusiens, comme des rats accompagnent une poubelle ... J’ai reconnu parmi eux un grand vieillard à barbe blanche et à la peau diaphane, Aharon Cohen , qui s’était « illustré » en participant à la conférence négationniste de Téhéran en décembre 2006 : trois individus au total, que j’ai pratiquement toujours vus « cornaqués » par des Iraniens barbus, et jamais aperçus, par exemple, en train de prier, ce qui est étrange pour des Juifs orthodoxes ! Aperçue également, une figure connue de l’antisionisme radical, Michel Warchawski - costume de velours noir et barbiche blanche, autre genre de Juif que la liberté retrouvé de son peuple empêche de dormir !

Mais ce quarteron de pauvres types pesait peu, en vérité, face à une présence juive absolument imposante : des étudiants (j’en ai déjà parlé), mais aussi des représentants de différentes ONG juives accréditées à l’ONU comme le B’nai Brith, et puis la présence de personnalités comme François Zimmeray, ou Patrick Gaubert le président de la LICRA. Quelques Juifs aussi, portant kippas sur la tête également, et nullement impressionnés par les « Belphégor ». Une présence numérique importante donc, et que j’ai pu vérifier au moment du discours incendiaire de Mahmoud Ahmadinejad ! Comme je vous l’ai déjà dit, nous n’avions pu y assister en direct, et nous étions dans une grande salle de conférence d’un autre bâtiment, à le suivre sur un écran géant - et sans traduction simultanée. Dès qu’il est apparu, les délégations juives « officielles » sont sorties en signe de protestation, avec à leur tête Elie Wiesel ... Je suis resté, prenant des notes grâce à l’aide de ma voisine, une réfugiée iranienne qui me traduisait le persan en anglais : lorsque le gnome nazi a commencé à « déraper » en lançant ses diatribes habituelles sur « l’exploitation de l’holocauste pour implanter le régime sioniste au Moyen Orient », nous avons assisté en direct au départ des 23 délégations européennes : et ce fut un tonnerre d’applaudissements ! Nous avons crié « vive l’Europe », et j’avoue avoir éprouvé un plaisir immense en voyant le regard dépité d’une brochette de femmes voilées, peinées de voir huer leur « idole » !

Je n’ai pas assisté, ensuite, à « l’accueil » d'Ahmadinejad sous les huées, alors qu’il allait donner une conférence de presse : beaucoup de personnalités étaient venues l’attendre pour l’interpeller, et on reconnaît sur la photo du haut Elie Wiesel ; à sa droite, portant une pancarte écrite en farsi, le professeur Alan Dershowitz, autre grande voix juive que j’allais entendre au cours de ces journées mémorables (voir prochain article) ; tout à fait à la gauche de la photo, portant le fameux « nez rouge » symbole de la mascarade, le jeune Sacha Schmitz qui a publié un direct des reportages sur son blog, d'où est également tirée la photo (voir article de dimanche dernier).

Mais d’autres étaient au rendez-vous, et pas des moindres pour dénoncer les « donneurs de leçons » islamistes : ainsi lors d’un colloque intitulé « Resisting Authoritarianism : Human Rights, Democracy and the Dissident Mouvement » (je n’ai pu non plus y assister, cette conférence ayant eu lieu la veille de l’ouverture de « Durban II »), ont témoigné deux invités prestigieux de « Rencontre », les journalistes Caroline Fourest et Mohamed Sifaoui (j'ai eu le bonheur de bavarder avec lui par la suite dans les couloirs de l'ONU) ; mais également des dissidents iraniens, vénézuéliens et deux anciens prisonniers qui furent torturés dans les geôles de Kadhafi, une des cinq malheureuses infirmières bulgares - dont ce blog a si souvent parlé -, et le médecin palestinien qui fut leur compagnon d’infortune : quand on sait que le comité de préparation à la conférence contre le racisme avait comme présidente une Libyenne et des vice-présidents iranien et cubain, ce colloque tenu à Genève était symboliquement une gifle à tous les totalitaires de la planète
(lire ici) !

Genève n’a pas, par ailleurs, vu les dérives de Durban rappelées ci-dessus, et l’on doit admettre une certaine vigilance du service d’ordre de l’ONU, même si - et c’était inévitable - il y a eu aussi la distribution par les ONG de brochures virulentes à la sortie de certaines « conférences privées » : mais les défenseurs d’Israël n’étaient pas en reste non plus pour dénoncer l’Iran, l’antisémitisme contemporain, ou la partialité du « Conseil des droits de l’homme de l’ONU » ... Et même s’ils se sont plaints - à juste titre - d’avoir été oubliés dans la résolution finale, dont le projet avait été bouclé vendredi 17 avril au soir au termes de laborieux compromis -, les témoins des grandes atrocités contemporaines ont pu, même de façon discrète, se rappeler un peu à la mémoire des hommes - et cela, contrairement à Durban 2001, où la planète était présentée comme un immense Disneyland où la seule part souffrante de l’humanité était palestinienne ! Ainsi, j’ai assisté à une manifestation pour le Darfour sur la place des Nations, juste en face de l’ONU (photo du milieu). Enfin, aussi, une exposition - dans une aile un peu discrète, mais tout le monde pouvait y accéder - rappelait ce que furent le génocide du Rwanda en 1994, et l’incurie lamentable des Nations Unies ...


Jean Corcos