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31 août 2006

André Nahum hier sur Judaïques FM, à propos de la résolution 1701 : "on se pose de sérieuses questions..."

Les Ministres des Affaires Etrangères
Tzipi Livni et Philippe Douste Blazy
(conférence de presse commune, Paris, 23 août 2006)

Introduction :
Voici le texte du dernier billet hebdomadaire de mon ami et collègue de la radio. Comme d'habitude, André Nahum va droit à l'essentiel en mettant sur table les enjeux d'un succès - ou d'un échec - de la résolution du Conseil de Sécurité de l'ONU.
J.C

Bonjour.

La force internationale de l'ONU au Liban tend à prendre forme, sans que l'on sache encore ce que seront exactement ses attributions et sa mission. La France qui a été à l'origine avec les USA de la décision 1701 du Conseil de sécurité, a finalement décidé après quelques atermoiements, de porter sa contribution à 2.000 hommes environ après que l'Italie ait annoncé qu'elle en enverrait près de trois mille et qu'elle désirait en assurer le commandement.
Après que Sayed Hassan Nassrallah, chef suprême du Hezbollah ait proclamé à hauts cris sa victoire "divine", il vient de revenir à plus d'humilité en reconnaissant que s'il avait pu prévoir la vigueur de la riposte israélienne, il n'aurait jamais ordonné l'enlèvement des deux soldats. Il ne serait donc pas tellement sûr que cette victoire qui a enivré les ennemis avoués ou cachés d'Israël et pas seulement dans le monde arabo-musulman, soit aussi évidente que cela. Par ailleurs, son comportement laisse penser qu'il n'est pas trop pressé de se frotter à nouveau à Tsahal. S'agit-il de regrets sincères ou d'une nouvelle manœuvre politique pour rassurer la France et les autres pays européens ? Il est fort possible d'ailleurs que son patron le président Ahmadinejad lui ait tiré les oreilles pour avoir provoqué ce conflit beaucoup plus tôt que ne l'aurait souhaité Téhéran. Parce que aujourd'hui, quoiqu'on en dise et quelque soit la frustration des Israéliens de n'avoir pas remporté une victoire décisive, Israël a déjoué les plans de l'Iran en dévoilant et en détruisant en grande partie la puissante base que le pays des Ayatollahs avait édifiée au Liban en vue sans doute d'ouvrir un second front en cas de conflit avec les USA.
Le gouvernement israélien a accepté le cessez-le-feu alors que le Hezbollah est encore debout malgré ses pertes matérielles et humaines et s'en remet ainsi aux instances internationales, estimant que, comme ne l'a pas dit Clausewitz, la politique c'est la guerre par d'autres moyens. Mais peut on faire confiance à l'ONU ? La décision 1701 exige la libération des deux soldats et l'on n'en est encore qu'à de vagues promesses de négociations. Elle prévoit le désarmement du Hezbollah et M. Kofi Annan nous prévient que ce n'est pas l'affaire de la force multinationale. Il était dit également qu'il fallait surveiller la frontière syro-libanaise pour empêcher la reconstitution de l'arsenal de la milice chiite. Or nous apprenons que les forces de l'ONU ne patrouilleront pas le long de cette frontière, la Syrie et le Liban s'y opposant.
Alors, on est pris d'un sérieux doute : si la force internationale n'a pour mission ni de libérer les captifs, ni de désarmer le Hezbollah ni de l'empêcher de reconstituer son stock de missiles et de reconstruire ses blockhaus, à quoi va-t-elle servir exactement ? On est bien loin de la force "coercitive" que Jacques Chirac appelait naguère de ses vœux. Si les soldats de l'ONU ne feront que cohabiter dans la joie et la bonne humeur avec le Hezbollah, ne seront-ils pas, par contre, un obstacle sérieux pour Israël, s'il se voyait obligé d'intervenir à nouveau ? Alors, lorsqu'on apprend que Monsieur Kofi Annan vient admonester Israël pour de prétendues violations du cessez-le-feu et le somme de lever le blocus aérien et maritime du Liban, alors qu'aucune des conditions de la résolution 1701 n'est encore remplie, on se pose des questions, de sérieuses questions.

André Nahum,
30 août 2006

30 août 2006

Tripoli : la mort à nouveau requise contre les infirmières bulgares et le médecin palestinien

Les infirmières et le médecin devant leurs juges,
Tripoli, 29 août 2006 (photo Reuters)

Encore une photo bien déprimante des "otages" de Khadafi, toujours "en cage" (de telles grilles sont la norme pour les procès de présumés criminels dans le monde arabe), avec cette fois, non pas un policier moustachu devant les grilles (voir "post" du 13 juin), mais des policières, doublement coiffées du hijab et d'une casquette.
Mais surtout, des nouvelles angoissantes pour ce procès en appel où on attendait que soit, enfin, reconnue l'innocence des membres du corps médical emprisonnés depuis 1999 - cinq infirmières bulgares et un médecin palestinien qui crient leur innocence face à l'ubuesque accusation de contamination volontaire de centaines d'enfants par le virus du SIDA ... C'est une affaire qui n'en finit pas de me bouleverser depuis mon premier "post" du 11 novembre 2005, à quelques semaines de l'arrêt ayant cassé leur première condamnation à mort de mai 2004 (cliquer ici), et depuis mon émission du 15 janvier dernier avec leur défenseur, Maître Altit.

Ci-dessous un extrait de la dépêche de l'Agence Reuters qui raconte la session d'hier de la Cour d'appel de Tripoli :
"La peine de mort a été requise contre cinq infirmières bulgares et un médecin palestinien accusés par la justice libyenne d'avoir volontairement inoculé le virus du sida à plus de 400 enfants.
"Ce fut un acte cruel, criminel et inhumain. C'est une catastrophe humaine", a déclaré le procureur Omar Abdoulkhalek devant le tribunal de Tripoli avant de réclamer la peine de mort contre les accusés. (...)
Les cinq infirmières bulgares, Chejana Dimitrova, Nasya Nenova, Valentina Siropolu, Christiana Valcheva et Valia Tcherveniachka, et le médecin palestinien Achraf Alhajouj, qui sont détenus depuis 1999, ont constamment rejeté les accusations portées à leur encontre.
Au cours de leurs deux procès, ils ont affirmé que leurs aveux leur avaient été arrachés sous la torture, allégation soutenue par la Bulgarie et ses pays alliés.
Des spécialistes de la lutte contre le sida affirment eux qu'une épidémie d'infections au VIH avait éclaté dans l'hôpital de Benghazi avant leur arrivée dans l'établissement de soin. Mais ces experts étrangers, qui avaient été entendus par la cour lors du premier procès, n'ont pas été convoqués pendant le second procès."

Prochaine séance du procès : le 5 septembre. Et suite (sybilline) de la dépêche de Reuters, qui dévoile les coulisses, sordides, des négociations qui doivent se dérouler en coulisse :
"Tripoli a laissé entendre que les infirmières pourraient être libérées si la Bulgarie acceptait de dédommager les enfants et leurs familles, qui réclament 4,4 milliards d'euros en dédommagement.
Le gouvernement de Sofia a refusé de payer, mais s'est joint aux États-Unis et à l'Union européenne qui se sont mis d'accord avec la Libye sur la création d'un fonds de soutien aux familles."

En attendant, je me fais à nouveau et par l'intermédiaire de ce blog, le (modeste) relais de la campagne internationale organisée pour sauver ces innocents, en vous redonnant le lien sur la page de nos amis de l'association Bulgaria-France - où vous trouverez le détail de toutes les actions menées pour les libérer.

J.C

29 août 2006

Numéro 200 de « Rencontre » : un rendez-vous spécial à noter pour le dimanche 10 septembre !


Dimanche 10 septembre, j’aurais le plaisir de vous présenter une émission ... un peu spéciale, car il n’y aura pas d’invité, et je serai le seul au micro ! Ce sera en effet le 200ème numéro de « Rencontre », et il fallait marquer l’évènement. En plus, j’ai eu envie de prendre un peu de recul en raison des hasards du calendrier qui ont fait tomber cet anniversaire à la rentrée. Il tombe en effet après les traditionnelles rediffusions de l’été (qui sont au diapason de la programmation au ralenti de notre station pendant les vacances), et avant les fêtes juives de l’automne - qui, cette année, feront annuler deux numéros de mon émission. Le numéro suivant de « Rencontre » est programmé pour le dimanche 22 octobre !

D’autres hasards, ceux de l’actualité cette fois - avec la guerre brutale et inattendue entre Israël et le Hezbollah - me donnent des raisons supplémentaires pour prendre un peu de temps et donner aux auditeurs, de façon directe, ma propre analyse de la situation. J’en profiterai volontiers, car cela ne se fait pas en général dans le cadre d’une interview : le journaliste qui interroge un invité doit s’effacer pour que les idées de son hôte puissent s’exprimer, même si (et c’est plutôt ma façon de concevoir la relation), j’essaye de faire autre chose que tendre un micro, en guidant le débat à partir de faits - et pas de questions « bateau ». Je serai amené aussi à rappeler - pour les auditeurs qui entendent d’une oreille discrète, mais qui n’écoutent pas - l’objet de cette série, sa ligne éditoriale et ce qui constitue son originalité par rapport à ce que l’on entend à propos de ces sujets brûlants, à la fois sur le 94.8 FM et sur la bande FM ou ailleurs ... Pour ceux qui ne seront pas à l’écoute, cela fera l’objet d’une série de « posts » en ce mois anniversaire.

Mais célébrer la longévité d’une série - plus de 9 ans, la « première » a été diffusée en mai 1997 -, cela doit dépasser l’auto-satisfaction : on ne progresse que grâce à l’auto-critique, et si on n’y arrive pas, alors il faut susciter la critique des autres. J’en appellerai donc à vos avis et suggestions dimanche 10 septembre, en rappelant notre adresse mail. Et pour ceux qui sont à la fois auditeurs et lecteurs du blog, vous aurez la possibilité de le faire AVANT en écrivant à l’adresse : rencontre@noos.fr. Je pourrai ainsi répondre en cours d’émission à votre courrier que j’espère abondant : Comment trouvez-vous la série ? Quels sont les sujets qui vous semblent trop souvent abordés et ceux qui vous paraissent négligés ? De quoi voudriez-vous que l’on parle ? Cette série vous apporte-t-elle quelque chose d’autre que les autres émissions de 94.8 FM, et quoi précisément ? Quelles sont vos suggestions ?

Tous à vos claviers !


J.C

27 août 2006

Libanaise, contre le Hezbollah !

Elle s'appelle Brigitte Gabriel, c'est une citoyenne américaine d'origine libanaise, chrétienne et réfugiée aux États-Unis depuis la fin de la guerre civile. Elle s'est déjà exprimée en public à plusieurs reprises pour dénoncer la terreur islamiste et dire - oh surprise pour des oreilles européennes tellement formatées par le "politiquement correct" - combien elle avait de reconnaissance pour Israël, et combien elle souhaitait une paix véritable.
Ci-dessous des extraits de son intervention devant l'Université de Duke.
"Je suis honorée et fière d'être aujourd'hui parmi vous en tant que Libanaise parlant en faveur de la seule démocratie du Moyen Orient, Israël. J'ai été élevée dans un pays arabe et je voudrais vous donner ici un aperçu venant de l'intérieur du monde arabe. J'ai grandi au Liban où on m'a enseigné que les Juifs étaient "le Mal", Israël "le Diable" et que nous n'aurions la paix au Moyen Orient que le jour où tous les Juifs seraient morts, engloutis dans la mer (...). Ce sont les Israéliens qui nous ont sauvé au Liban. Ma mère a été blessée par un obus tiré par des "jihadistes" et elle a été transportée vers un hôpital israélien pour être soignée (...) On attribue les attentats-suicide au désespoir de l'occupation. Ceci est un leurre. Je vous rappelle que la première attaque terroriste commise par des Arabes contre des Juifs en Israël a eu lieu 10 semaines avant la déclaration d'indépendance. Elle a eu lieu un dimanche matin, le 22 février 1948, anticipant cette indépendance. Trois camions piégés ont explosé dans la rue Ben Yéhouda à Jérusalem et 54 personnes sont mortes et il y eut des centaines de blessés. Le terrorisme arabe n'est pas mû par le désespoir mais par une volonté farouche d'empêcher tout état juif dans la région (...) Il est grand temps de se lever pour soutenir et défendre l'état d'Israël, pays à l'avant-garde de la lutte contre la terreur islamiste."

Brigitte Gabriel s'est à nouveau exprimée en public pour défendre Israël, cette fois c'était devant des millions de téléspectateurs de la chaîne CNN, au cours de la guerre avec le Hezbollah. L'interview est bien sûr en anglais, mais avec sous-titres en Français. Elle n'a pas de propos très amènes pour l'organisation terroriste et son idéologie de haine ; pour l'actuel président libanais Emile Lahoud ("puppet" : pantin) inféodé à Damas ; ainsi, bien sûr, que pour le régime syrien. Elle rappelle notamment que, il y a plus de vingt ans, la paix avait failli être signée avec Israël, et que ce sont la Syrie et l'Iran qui l'ont empêchée avec l'assassinat du jeune président tout juste élu, Béchir Gemayel. Elle demande aux démocraties de faire pression sur la Syrie, et de laisser Israël briser le Hezbollah, dont l'idéologie de haine menace l'ensemble du monde. A noter que la séquence finit par des images de défilé de l'organisation chiite, avec portrait géant de l'Ayatollah Khamenei, son mentor iranien.
Même si Brigitte Gabriel n'est pas très représentative de ce que pensent aujourd'hui la majorité des Libanais - qui doivent (et on les comprend) en vouloir aussi à Israël pour les destructions dans leur pays -, ce qu'elle dit doit être pensé, au moins en partie et en silence, par beaucoup de ses ex-compatriotes.
A voir et surtout à écouter !

J.C




BGabriel
envoyé par CODEinstitute

26 août 2006

Réparer les dégâts en Israël : des adresses pour aider

Enfants dans un abri à Naharya,
pendant un bombardement du Hezbollah
(photo tirée du site du journal "The Jerusalem Post")

J’ai évoqué, à plusieurs reprises, le prix matériel très lourd payé par Israël au cours de la dernière guerre avec le Hezbollah. Les auditeurs de Judaïques FM, comme ceux des autres radios de la fréquence juive, à Paris ou en Province, entendent tous les jours des bandes enregistrées donnant des adresses pour envoyer des dons. Ces dons permettront, même de façon très partielle, d’aider l’économie à en payer le prix (environ 5 milliards de dollars, en comptant à la fois les destructions, le coût du conflit proprement dit et le recul de la croissance) ; et à réparer le plus vite possible les dégâts dont l’inventaire n’est pas fini (lire détails ici).
Je vous avais parlé le 8 août de l’opération « Urgence Nord d’Israël » ; le site donné en lien annonce que ses opérations de collecte sont maintenant terminées. Je me fais donc bien volontiers le relais d’autres adresses, dont j’ai été informé par une multitude de mails - les boites à lettres étant vite saturées, hélas, en ces temps de crise !

Tout d’abord la mairie de Haïfa lance un appel à l'aide face aux conséquences des bombardements du Hezbollah, notamment sur les plus démunis. Pour rappel, j’avais mis en ligne le 16 août un petit film montrant la destruction d’un immeuble de cette ville par l’impact d’un missile. Elle fait face à une situation exceptionnelle que les autorités ne peuvent totalement assumer par leurs seuls moyens, et pour laquelle elles ont un besoin urgent du concours et de la solidarité de toutes les bonnes volontés. Les dons peuvent être adressés, par chèque, à l'adresse ci-dessous :
THE HAIFA FOUNDATION 38 Héhalutz Street - 33113 Haifa - Israël
Contact :
Tel: 972.4.8621582 - 972.4.8628593
Fax: 972.4.8628532
e.mail: haifund@netvision.net.il

Mon ami Sammy Ghozlan, « collègue » animateur sur Judaïques FM et dont j’ai souvent cité sur le blog les innombrables initiatives pour Israël et la Communauté, a réactivé le « Secours français aux sinistrés d’Israël ». Ce fond avait été créé en 1991, lorsque le pays subissait les tirs de missiles SCUD envoyés par Saddam à l’occasion de la première guerre du Golfe ... Sammy Ghozlan a écrit le 11 août au Ministre des Affaires Étrangères pour lui demander de consentir vis-à-vis des populations civiles israéliennes la même campagne de solidarité et d’information que celle qui avait été tout de suite décidée par le Liban. Après accord, M. Philippe Douste Blazy a fait ouvrir une ligne téléphonique d'appel pour l'aide humanitaire en faveur des victimes civiles israéliennes. Le Secours Français aux Sinistrés d'Israël qui continue de recevoir les dons à son adresse, fera par ailleurs connaître aux Services du Quai d'Orsay, toutes les demandes d'aides qui lui parviendront, émanant des organisations humanitaires, et des mairies des villes touchées.
Le numéro d'appel à l'aide humanitaire est le 0800480480
SECOURS FRANCAIS AUX SINISTRES D 'ISRAEL
4O RUE D 'HAUTPOUL 75019 PARIS

Enfin, je me dois de rappeler l’organisme central de collecte de la Communauté qui est l’APPEL UNIFIE JUIF DE FRANCE (39 RUE BROCA, 75.005 PARIS). Dès le début du conflit, un fonds spécial avait été créé pour permettre le logement de milliers d’enfants qui étaient - en cette période de congés scolaires - dans des centres aérés du Nord du Pays : il fallait les mettre à l’abri, et les héberger dans des centres au Centre et au Sud du pays. Cette opération étant finie, d'autres actions sont bien sûr prévues. Des missions de solidarité sont prévues, plus d’informations sur leur site en lien.

J.C

24 août 2006

Une victoire stratégique et historique - de Kippour 1973 au Liban 2006

Le sheikh Hassan Nasrallah
(photo tirée du site www.checkpoint-online.ch)

On s’en souvient peut-être, c’était le lundi 14 août, le jour même du cessez-le-feu. Sheikh Hassan Nasrallah diffusait un message télévisé, filmé dans la cachette où il se terre depuis un mois et demi, et c’était un message à la fois de victoire et de mépris pour les peuples et armées arabes du Moyen Orient. En résumé disait-il, je suis arrivé moi Nasrallah, le chef d’une petite milice de quelques milliers d’hommes, à faire ce que personne d’autre à part moi était arrivé à faire dans la région : tenir tête à Tsahal. Et nous avons remporté une victoire stratégique et historique.

Que ceci ait été accepté par les opinions publiques arabes est peu étonnant, car avant lui Nasser, Saddam et Arafat furent aussi plébiscités comme vainqueurs après chaque défaite sur le terrain. L’absence de presse faisant preuve d’esprit critique dès qu’Israël est concerné, le parti pris sans complexes des télévisions satellitaires comme Al-Jazeera, la propension des foules à gober n’importe quoi comme au moment de « l’affaire des caricatures de Mahomet », tout ceci constitue hélas des avaries connues. Je ne résiste pas au plaisir de vous faire découvrir l'article de Rafik Halabi, journaliste arabe dont l’article a été publié dans le journal israélien « Haaretz » ! Il dénonce la partialité choquante d'Al-Jazeera au cours du conflit ; en voici la fin (dans sa traduction anglaise) :
"Al Jazeera apparently has two distinct codes: The one relating to the Arab world is based on journalistic values of fairness and search for the truth; the other has to do with Israel. All of the commentators who appeared in the Al Jazeera studios in Egypt and in Beirut saw only Israeli failures. And what about the suffering of the hundreds of thousands of Lebanese refugees whose world had come tumbling down on them? (...) The impression emerged that Al Jazeera has an ideological line that is nourished by "the Arab nationalists" and "the Islamic resistance." Al Jazeera, my favorite channel, severely disappointed me during the Lebanon War when it fled from fulfilling its journalistic obligation and preferred to serve as a bulletin board on which the Hezbollah hung its statements."

Plus grave que la proclamation de victoire d’un chef de guerre aussi calculateur que fanatique, plus étonnante que les comptes-rendus fantaisistes des médias arabes, il y a en Israël - surtout depuis le début de la semaine - une vague de mécontentement qui semble prête à balayer toute l’équipe gouvernementale. En gros, une grande partie du public semble maintenant accepter la thèse d’une victoire du Hezbollah, alors qu’une majorité relative pensait le 14 août qu’il s’agissait d’un demi-succès. Un tel défaitisme me semble particulièrement dangereux, alors que pointe l’ombre d’un conflit beaucoup plus large et meurtrier, celui-là avec les mentors de Nasrallah, Syrie et/ou Iran ... En ce sens, et même si je ne partage pas son idéologie, je suis tout à fait d’accord avec l'article du Rabbin Yoel Bin-Nun publié sur le site Internet du "Yediot Aharonot" : en résumé, « à force de dire que l’ennemi a gagné, nous allons rendre réelle leur victoire ». Sur le même journal, un auteur tout à fait opposé à la tendance du précédent, Gadi Taub, présente une théorie très fine : la survie d’Israël étant basée à la fois sur des frontières stables et sur une majorité juive, il n’y a pas dans le fond d’autres solutions que des évacuations unilatérales face à des ennemis qui ne veulent pas négocier ; mais la menace des missiles rendra impossible le « plan de convergence » du parti Kadima ; donc elle condamne à terme le parti centriste. Autrement dit, par ses milliers de roquettes lancées sur la population civile, le Hezbollah a « voté » pour le Likoud - comme le Hamas l’avait fait lors de la campagne d’attentats suicides qui avait conduit Netanyahou au pouvoir il y a dix ans !

Et ceci me conduit à me souvenir d’une autre guerre, celle-là vieille de 33 ans et qui ne me rajeunit pas ... On parle de la guerre du Kippour à propos de la « Commission d’enquête » qui va analyser les fautes éventuelles du gouvernement - comme celle qui entraîna la chute du gouvernement de Golda Meir en 1974. Après cette guerre, il y eut une vague de contestation en Israël pour dénoncer l’impréparation de l’armée et la défaillance du gouvernement, qui n’avait pas voulu prendre au sérieux les avertissements de ses services de renseignement. Exactement comme aujourd’hui sont dénoncées par des réservistes démobilisés les défaillances en matière de logistique, défaillances étalées aux yeux du monde - vive la démocratie ! - par la presse israélienne ! On peut se féliciter, après coup, que cette « mini - guerre » les ait révélées avant un conflit plus sérieux. Même chose aussi en ce qui concerne les pertes de blindés dues à l’armement anti-chars perfectionné dont disposait le Hezbollah : Tsahal en tirera rapidement les leçons, et améliorera ses capacités tactiques. Mais si on tire un parallèle jusqu’au bout avec Kippour 1973, le Liban 2006 aboutira ... à la prochaine victoire électorale de la Droite nationaliste, comme ce fut le cas en 1977, où les travaillistes perdirent le pouvoir pour la première fois !

Mais poursuivons sur cette analogie historique, pour montrer que les prophéties à chaud peuvent s’avérer erronées : aux lendemains de ce qu’ils appelèrent « la guerre du Ramadan », les peuples arabes - déjà ! - crièrent à la fin du mythe de l’invincibilité israélienne. On pouvait lire (comme maintenant) de sombres articles dans la presse française, où d’éminents experts vous expliquaient que l’état juif ne survivrait pas s’il était régulièrement saigné tous les cinq ou six ans ... La réalité fut tout autre au niveau des décisionnaires politiques : en Égypte, Anouar El Sadate décida de faire la Paix, jugeant insupportable le prix à payer pour une nouvelle guerre ; en Syrie, Hafez El Assad, lui, décida de geler la situation sur le Golan, où le canon a cessé de tonner depuis 1973 ! Seuls convaincus que « la victoire était au bout du fusil », les différentes organisations palestiniennes lancèrent au cours des années 70 une campagne d’attentats meurtriers à partir de leurs bases du Liban ... campagne qui n’aboutit à rien mais qui finit par entraîner l’invasion israélienne de 1982. Ceux qui se délectent de la soit disant victoire de Nasrallah souhaitent-ils vraiment que l’on revive de tels épisodes ?

Toujours à propos du parallèle avec la guerre du Kippour, Edward Luttvak (qui est un analyste militaire basé à Washington), a publié un article percutant dans le « Jerusalem Post » sous le titre "Mal lire la guerre du Liban". Il rappelle que la guerre de 1973 fut, aussi, vécue comme une défaite, alors qu’il y eut un redressement de la situation sur le terrain après des pertes terribles sur le front (plus de morts par jour que pendant la dernière guerre qui dura un mois) ; et il se montre indulgent vis-à-vis du gouvernement israélien, qui ne pouvait imposer une mobilisation générale alors que les pertes civiles dues aux missiles du Hezbollah restaient supportables. Comme l'écrit très justement Ludovic Monnerat, officier suisse d’active qui édite un blog remarquable, « les tergiversations politiques et la timidité opérative des Israéliens sont la principale cause de leur succès limité. Ils ont réagi rapidement face à l'ouverture stratégique que le Hezbollah leur a fournie sur un plateau, mais ils n'ont pas su pleinement adapter le rythme et la modalité des opérations au caractère ponctuel de cette ouverture. Ce qui est une constante : dans un affrontement du fort au faible, ce sont les faiblesses du fort qui sont décisives, et pas les forces du faible ».

Voilà donc quelques biscuits pour celles et ceux qui se seront laissés impressionner par la rhétorique du leader du Hezbollah ! Et si ces provisions ne vous suffisent pas, je recommande la lecture :
- de l'article du journal anglais "The Times" intitulé « Si cela est une défaite, les Israéliens devraient prier pour en avoir d’autres » ;
- de l'article de Ram Zenit dans le blog « PAF », qui critique l’article pessimiste d’Elisabeth Schemla dont je vous avais parlé.

J.C

23 août 2006

Les bombes tombent, les blogueurs dialoguent ...

Introduction :
Encore un article intéressant déniché cet été dans le "Wall street journal". Sarah Ellison rapporte que, alors que leurs pays sont en guerre, des Israéliens et des Libanais conversent sur la Toile, à partir des espaces de conversation intégrés à des blogs personnels. Elle rappelle que tout échange est interdit par le Liban, et ce depuis des décennies, bien avant le conflit de 2006 : pas de liaisons téléphoniques, interdiction à tout citoyen libanais de se rendre en Israël, interdiction bien sûr en sens inverse de toutes visites d'Israéliens dans le "pays du Cèdre" ... Traduction d'extraits choisis.
J.C

Lisa Goldman, une femme israélienne de 39 ans née au Canada et "bloguant" à Tel Aviv, a écrit dans un récent "post" : "est-ce que l'on verra pour la première fois des résidents de pays ennemis dialoguer alors que les missilent pleuvent ?"
La plupart des blogueurs de ce petit groupe de dialogue ont une éducation occidentale. Certains ont suivi les cours des mêmes universités, mais ont communiqué pour la première fois en commentant un article découvert sur le blog d'un autre. Bien sûr, il est difficile de savoir si un contributeur au "chat" vit dans une banlieue bombardée de Beyrouth, ou dans un appartement aux USA. Beaucoup de blogueurs libanais ont fui leur pays pour la Syrie, l'Europe ou l'Amérique.
Lisa Goldman dit que l'Internet rend possible un dialogue en temps réel : "j'ai discuté avec un blogueur libanais qui me racontait en direct comment il voyait tomber les missiles tirés par des avions israéliens sur sa ville. Cet internaute édite le "Lebanese Political Journal Blog", et ne veut pas bien sûr que son identité soit dévoilée en raison des risques. Mais il m'a dit : "nous devons tous nous souvenir que nous sommes d'abord des êtres humains, quelques soient les frontières"."
Elle rapporte comment elle a répondu à un blogueur furieux contre Israël : "Tous, Libanais comme Israéliens, nous souffrons de ce conflit, OK ? Donc quand vous gémissez, gémissez pour tous, car nous sommes les citoyens des deux seules démocraties de la région, et nous voyons nôtre rêve de Paix détruit par d'infects fanatiques religieux".
Elle raconte enfin comment elle avait fait la connaissance d'un homme cadre supérieur libanais, travaillant pour une importante société internationale, et signant sous le pseudo "Le perpétuel réfugié". Avant le conflit, ils avaient pris contact grâce aux échanges sur leurs blogs, et il était même venu à Tel Aviv. Il se trouvait à Beyrouth lorsque les bombes ont commencé à tomber, et son état d'esprit a complètement changé. "Bienvenu dans mon holocauste libanais" a été le titre de son premier "post" publié juste après. Et il a écrit à Lisa Goldman : "J'espère que vous resterez sauve. Le Monde a besoin de plus de personnes comme vous. Je vous considère toujours comme mon amie. Mais je ne reviendrai jamais en Israël".

The Wall Street Journal, 
31 juillet 2006

21 août 2006

Le réveil chiite – suite

Femme chiite d'Irak, photo prise à la sortie des urnes

J’avais choisi ce titre pour ma dernière émission avec l’orientaliste Antoine Sfeir, émission qui sera rediffusée sur Judaïques FM dimanche prochain 27 août. A l’époque, tout le monde s’inquiétait déjà beaucoup de la menace iranienne avec sa course à la bombe, et pas tellement de celle du Hezbollah qui a déclenché la guerre sur la frontière Nord d’Israël.

Aujourd’hui, les observateurs remarquent tous le paradoxe dans lequel semblent piégés les États-Unis. D’un côté, leur occupation de l’Irak ne tient que grâce au soutien des dirigeants chiites « modérés », qui ont accueilli avec bienveillance une invasion venue les débarrasser de Saddam Hussein. Il y a certes la tendance « dure », celle du Moqtada El Sadr, qui a défié le pouvoir de Bagdad et entamé une mini - révolte il y a deux ans, mais sur le fond les choses sont claires là-bas : l’ennemi, c’est l’intégrisme sunnite avec la branche irakienne d’Al-Qaïda et ses terribles attentats. D’un autre côté, à quelques centaines de kilomètres de là, entre Beyrouth et la plaine de la Bekaa, le paysage s’inverse complètement : les Sunnites soutiennent le gouvernement anti-syrien (lui-même répressif envers sa majorité sunnite) et plutôt pro-occidental de Fouad Siniora - même si le rapport de forces est difficile envers la minorité libanaise chiite, devenue elle-même la majorité des Musulmans du pays ... Ennemi d’Israël, donc des États-Unis, le Hezbollah appartient clairement à « l’axe du mal », même si - prudente - l’administration Bush ne veut pas participer à l’UNIFIL, histoire de ne pas s’aliéner les cousins chiites irakiens !

Mais au-delà de ce paradoxe géostratégique, y aurait-il dans la tradition chiite deux courants, l’un libéral, l’autre obscurantiste ? Antoine Sfeir le pense, et il l’a dit à notre micro. Alexandre Adler le pense aussi, et y a consacré un article dans « Le Figaro » du 10 août, en voici un extrait pour avoir un éclairage historique :
« Les deux versions opposées du chiisme partent de deux sources bien distinctes. À l'est, l'intégrisme sunnite indo-pakistanais a ciblé, depuis fort longtemps, le chiisme local comme une doctrine «semi-païenne». Or, il se trouve que de Jinnah à la famille Bhutto, nombreux sont les chiites à avoir participé dans un rôle de premier plan à la naissance et au développement du Pakistan, tandis que d'autres aristocrates de même obédience ont demeuré dans des positions enviées en Inde. L'idéologie populiste et intolérante d'une armée pakistanaise de plus en plus influencée par l'Arabie saoudite aura fait le reste. La persécution des chiites est l'article de foi numéro un des talibans et de leur soutien saoudo-pakistanais.
Tout à l'opposé, se situe la doctrine d'une partie de l'intégrisme iranien qui, derrière l'association du clergé combattant, contrôle une bonne part de l'État persan. Pour cette génération de clercs formés dans la haine tout ensemble du régime impérial et du marxisme, la source principale d'inspiration a souvent été sunnite, celle des Frères musulmans égyptiens. Nous retrouvons intacts ces deux courants dans la mêlée actuelle. Le président iranien Ahmadinejad, héritier explicite du clergé combattant du défunt ayatollah Behechti, voudrait à toute force effacer le conflit sunnite-chiite qu'attisent, au contraire, Pakistanais et Saoudiens. »


Pour finir, je voudrais vous faire partager la perplexité dans laquelle m’a plongé un article lu dans le « Wall Street Journal » le 4 août, encore une lecture de vacances ... L’auteur, Peter Waldman, a illustré son papier par des « camemberts » édifiants donnant le pourcentage de Chiites dans les pays arabes, ils sont aujourd’hui 45 % au Liban, 63 % en Irak, 25 % au Koweït et majoritaires à Bahreïn. Principal interviewé, le professeur Vali Nasr, d’origine iranienne, dit que les États-Unis en renversant Saddam ont puissamment renforcé le régime chiite clérical de l’Iran. Aujourd’hui - son analyse fait frémir -, Le Caire, Amman et Riyad ont perdu le contrôle de la région, ce sont les Chiites qui ont le vent en poupe. L'antagonisme ethnique entre Perses et Arabes n'a plus d'importance, lorsque le leader religieux suprême en Irak est un Iranien (l'Ayatollah Sistani), et le responsable de la justice en Iran (Mahmoud Shahroudi) un Irakien. Il faut donc d’urgence reprendre langue avec l’Iran, qu’il compare à la Prusse du 19ème siècle. L’Iran a déjà un vaste réseau d’influence en Irak, sa coopération est donc indispensable pour maintenir l’ordre là-bas. Quand au Hezbollah, son succès s’explique par le fait que la constitution libanaise, basée sur une démographie dépassée, lui accorde une portion congrue du pouvoir : il faut donc essayer de changer - pacifiquement - les choses dans ce pays.

Autant de propositions qui me laissent bien perplexe, alors que l’odeur de la poudre ne s’est pas encore évanouie au dessus de la frontière Nord d’Israël. Car une chose est d’avoir une vision géopolitique à moyen terme. Une autre de gérer des fanatiques comme Ahamadinejad ou Nasrallah, dont « l’agenda » politique est uniquement conflictuel !

J.C

19 août 2006

Iran-Israël : premiers bilans pour un premier round

Photo tirée du site www.ynetnews.com

Victoire ou défaite d'Israël ? s’interrogent les deux excellents éditorialistes du site israélien « Guysennews ». Voici un « post » pour tenter une réponse, à partir de la synthèse de mes lectures, fort riches (et contrastées) de la semaine ! J’espère qu’il pourra vous aider à vous faire une idée, en lisant les nombreux liens, certains sur des articles de la presse nationale et les autres sur des textes en langue anglaise et tirés de la presse israélienne. Une impression, pessimiste, domine partout : une autre guerre se profile à l'horizon, celle-là ayant été le premier round de la confrontation - inévitable - avec l'Iran du fou furieux Ahmadinejad qui programme la destruction de l’État juif.


Six jours après sa déclaration officielle, le cessez-le feu semble bien fragile. Tout dépend en fait de la mise en œuvre, rapide, des dispositions de la résolution 1701 du Conseil de Sécurité, dont on trouvera le texte intégral sur le blog. Principal acquis pour l’État d’Israël de cette guerre de 33 jours, cette résolution consacre une victoire politique - mais elle ne servira pas à grand-chose si le reste du monde se défile.

Quid, par exemple, de l’embargo sur les armes à destination du Hezbollah ? Selon un article publié dans l'Express, la Turquie a permis le transit au dessus de son territoire des armes en provenance de l’Iran, et elle fait l’objet de vives pressions pour que cela cesse. La surveillance maritime du Liban doit être mise en place par plusieurs pays, et l’Allemagne s’est proposée pour cette tache. En attendant, le Hezbollah essaie de reconstituer ses arsenaux de missiles en partie détruits pendant le conflit, et Israël tente de l’en empêcher, c’était l’objet du raid dans la région de Baalbek samedi matin ... au risque de rompre le cessez-le-feu.

Pour ce qui concerne la force multinationale de 15.000 hommes qui devait se positionner au Sud Liban, elle semble avoir bien du mal à se mettre en place. La reculade de la France, en particulier, est jugée sévèrement à l’Étranger, car elle devait y jouer un rôle prépondérant.

Quelles leçons pour cette guerre d’un point de vue militaire ? Israël a fait face à un ennemi redoutable, doté d’armements russes et chinois perfectionnés livrés par l’Iran, et parfaitement entraîné. Ze'ev Schiff, le spécialiste reconnu des questions militaires du journal "Haaretz", donne le bilan le plus honnête qui soit du bilan de ce conflit, en résumant à la fois ce qui a été obtenu et les échecs par rapport aux objectifs. Ron Ben Yishai, lui, écrit un article en forme d’avertissement dans l’édition Internet du "Yediot Aharonot" : cette guerre n’est qu’un premier round, l'Iran, la Syrie et les organisations islamistes radicales ont un plan bien arrêté pour détruire Israël par étapes. Il faut, d’urgence, repenser tout ce qui relève de la défense, qu’il s’agisse des armes anti-missiles, de la protection des blindés ou de celle de la population civile, qui sera encore plus lourdement frappée lors de la prochaine guerre. Pour Elisabeth Schemla qui signe dans "proche-orient.info" un éditorial au ton catastrophique, la cause est entendue : Israël a perdu sa force de dissuasion, et l’Iran est le grand vainqueur du conflit !

La guerre, enfin, n’est pas qu’affaire de stratégie, de politique et de diplomatie : elle pèse son poids de deuil, de larmes et de destructions. Vous pourrez voir le visage des victimes israéliennes sur une page mise en ligne sur le site du Ministère des Affaires Étrangères de Jérusalem. Même si on peut penser (et dont le fond, c'est mon avis) que le Hezbollah n'a gagné ni militairement ni politiquement, même si les 5 milliards de dollars que coûtera le conflit seront vite absorbés par une économie israélienne très performante, le désastre est là, irréparable pour toutes leurs familles. Est-il besoin de le souligner ici, enfin ? Quelles que soient les responsabilités du Hezbollah et de ses parrains iraniens, les centaines de victimes libanaises innocentes sont aussi une catastrophe - pas seulement parce qu’elles ont la même valeur absolue que les victimes israéliennes ; mais aussi parce qu’elles contribueront à creuser encore plus le fossé de haine entre les deux peuples.

J.C

18 août 2006

Walid Joumblat : « Si Nasrallah s'en sort par une victoire, il dictera ses conditions à l’état libanais – s’il accepte encore l’Etat »

Walid Joumblat
(photo tirée du site www.warsoflebanon.com)
 
Suite aujourd'hui de mon reporting sur les médias internationaux et la guerre du Liban. Dans le grand hôtel andalou où j’ai eu la chance de séjourner, je pouvais aussi suivre l’actualité en consultant la sélection (un peu bizarre) de journaux mis à disposition. J’y reviendrai dans de futures publications.
 
Premier quotidien découvert, le "Wall Street Journal". Sympathisant d’Israël - mais à la mode anglo-saxonne, c'est-à-dire de façon sérieuse -, publiant des « libres opinions » diverses et permettant au public d’apprendre des faits et non pas de communiquer des sentiments passionnels. Le numéro du 31 juillet publiait ainsi deux témoignages d’acteurs libanais de premier plan, le leader druze Walid Joumblat (interviewé dans son « palais forteresse » de Moukhtara), et le leader chrétien Michel Aoun. Je ne parlerai pas du deuxième, qui a opéré un revirement à 180 ° à son retour au pays l’année dernière, en concluant un « pacte » avec le Hezbollah : sa tribune libre défendait une ligne politique en faveur d'un « apprivoisement » des « Fous d’Allah » ; c’est bien (pour le principe) que le « Wall Street Journal » lui permette de s’exprimer ; sur le fond, je ne crois pas du tout à l’intégration d’une milice fanatique dans une armée régulière - dont la troupe est déjà à majorité chiite.
 
Mais revenons à Joumblat, qui est une figure bien originale de l’échiquier politique locale, et je recommande vivement la lecture des biographies en lien, sur le site d’où est tirée sa photo. Fils d’une autre figure historique, Kamel Joumblat, assassiné par El Assad père pour « trahison » au début de la guerre civile libanaise (faut-il rappeler le caractère féodal des société arabes, avec leurs leadership héréditaires obligés ?), il a débuté tout jeune sa carrière de « dauphin » en jouant la carte syrienne. D’abord en combattant les Palestiniens d’Arafat, et en conservant une neutralité de Sioux pendant l’invasion israélienne de 1982. Après le départ de Tsahal de Beyrouth, il a joué à fond et à nouveau la carte de Damas, s’accommodant très bien (comme l’ensemble du personnel politique libanais, il faut le reconnaître) de l’occupation syrienne jusqu’au début des années 2000. Et puis, peu à peu, il fit un nouveau « virage sur l’aile », rejoignant les Maronites dans le groupe informel d’opposition dit de « Kornet Chehwan » ; opposition rejointe par la communauté sunnite après l’assassinat de son leader, l’ancien Premier Ministre Rafik Hariri : à partir de février 2005, Walid Joumblat est peut-être devenu le leader libanais le plus virulent contre Damas, au point de craindre pour sa vie ... c’est alors que nous avions évoqué sa personnalité complexe et ses virages politiques lors d’une intéressante émission en juin de l’année dernière où j’ai eu comme invité à Judaïques FM, Khatar Abou Diab, politologue libanais lui aussi d’origine druze.

Michaël Young, éditorialiste du journal « Daily Star » de Beyrouth, l’a donc interviewé alors que la nouvelle guerre du Liban venait de commencer. Traduction d’extraits choisis :

« Comme je l’ai dit aux Américains, aussi longtemps que la Syrie pourra envoyer des armes au Hezbollah, il n’y aura pas de changement de la situation. Pas avec ce régime à Damas. Nous avons besoin d’une force internationale qui couvre l’ensemble du Liban, comme au Kosovo. Surveillez la frontière syrienne, et parlez ensuite. »
« Si le Hezbollah refuse de désarmer, nous allons entrer dans une phase de guerre sans limites, avec le risque d’affaiblissement de l’État libanais (...) Je doute que l’on voit une force multinationale s'il continue de résister à Israël. Si Nasrallah s’en sort par une victoire, il dictera ses conditions à l’État libanais - s’il accepte encore l’État. »
« Nasrallah attend, comme le Président de l’Iran Ahmadinejad, le 12ème Imam, le « Mahdi ». Cet aspect de la mobilisation religieuse chiite est effrayant. »
« Les destructions que nous avons supportées ne valaient pas la capture de deux israéliens, le fait d’avoir une armée privée, de décider de déclarer la Paix ou la Guerre. Mais il faudrait que cela soit un chiite qui le dise à Nasrallah ».

« Oui, j’ai entendu des rumeurs sur des Iraniens combattant aux côtés du Hezbollah. Je crois à ces histoires ».
« J’ai peur qu’à cause du chaos au Liban aujourd’hui, la Syrie essaye d’assassiner des gens ici, moi y compris, mais aussi le Premier Ministre Siniora (...) Ou il survivra, ou nous devrons accepter le coup d’état fomenté par la Syrie et l’Iran ».



« The Wall Street Journal », 31 juillet 2006, 
traduction Jean Corcos

J.C

17 août 2006

Le Hezbollah, "chaînon manquant" des écrans de télévision

Combattants du Hezbollah faisant le salut nazi lors d'une parade


Introduction :
Après mon rapide panorama des télévisions internationales dans le "post" d'hier, un billet d'humeur à propos des télévisions françaises. Avez-vous par exemple vu une seule fois cette image sur vos écrans ? Il circule plusieurs photos du même genre sur le Web, défilés du "parti de Dieu" au pas de l'oie à la mode hitlérienne, saluts nazis bras tendu en pleine ville de Beyrouth ou à la frontière d'Israël ... L'agence israélienne MENA, basée pendant des années juste en face de positions Hezbollah dans la petite ville de Metula, a envoyé sans succès et à plusieurs reprises une photo du même genre à la presse française : et aucun journal n'a osé la publier ! Pratiquement aucune image des miliciens chiites, non plus, pendant la dernière guerre du Liban, nos chaînes de télévision présentant d'un côté une armée israélienne surpuissante, et de l'autre des civils désarmés. Paule-Henriette Lévy, rédactrice en chef de notre radio consœur RCJ, a parlé la semaine dernière de ce "chaînon manquant" de l'information dans un "rebond" du journal "Libération". Bravo pour cette mise au point !
J.C

Au Liban, une guerre entre soldats
"Que voit-on sur nos postes de télévision ou dans les news magazines ? Une armée, celle d'Israël, organisée, forte, en habit militaire kaki, qui se bat. Les journalistes de la presse internationale peuvent suivre, je l'ai fait, les combats de ce côté-là du front. Et on voit, de l'autre côté, un peuple qui souffre dans sa chair, des mères hagardes de douleur tenant des enfants morts dans leurs bras, des populations déplacées, et Beyrouth, ce bijou de l'Orient, à peine reconstruit qui fume sous les bombardements de Tsahal. La guerre qui se joue par l'image, devant nous, est bien celle-là, injuste, inacceptable. Un face-à-face odieux où agresseurs et martyrs sont clairement identifiés.

Seulement voilà, un élément manque, et ce chaînon-là, essentiel, fausse l'image à tel point que le vrai devient faux, et que tout ce qui nous semblait jusque-là évident n'est que supercherie. Cet élément manquant, absent des écrans de télévision et des pages de magazines, qui se cache dans l'ombre, c'est le Hezbollah. On voit donc une guerre «sur le terrain» avec une armée face à des civils sans défense. Alors qu'en vérité il s'agit bien d'une armée, mais face à une autre armée : le Hezbollah. On en parle comme d'un tout compact... mais c'est un tout fait de «combattants».

On connaît les liens de cette organisation avec la Syrie et l'Iran qui l'arment sans relâche, et on aperçoit parfois son chef, Hassan Nasrallah, d'apparence paisible en dépit de propos virulents, haineux, antisémites. Mais les membres du Hezbollah ne sont jamais photographiés, jamais filmés et leurs treillis olive sont absents des écrans du monde.
Il n'y a pas un «front Hezbollah» que les journalistes pourraient suivre pour témoigner, mais des rampes de lancement qui se déplacent, des camionnettes blanches remplies de mines rectangulaires, les lits asséchés des rivières pour «planquer» les lance-roquettes, ou des habitations de civils qui servent de cache d'armes.
Les hommes du Hezbollah, à l'instar des soldats israéliens, sont jeunes, surentraînés depuis des années dans des camps militaires qui ne portent pas, eux non plus, le nom de «bases». Cette armée tient entre ses mains l'arme la plus redoutable de toutes : l'art du camouflage.
Pas d'interview, pas de témoignage, pas de commentaire, pas de visage fatigué, pas de mort... Rien, et les civils libanais ne sont pas, seulement, pour eux, un bouclier humain. Ils sont un écran opaque qui fait oublier ces soldats d'un genre particulier, sans nom et sans visage.
Oui, la guerre qui se joue, ne nous y trompons pas, pas encore, est celle d'une armée israélienne contre une autre armée «hezbolienne».

La guerre qui se joue est un corps à corps entre des soldats contre d'autres soldats, des missiles contre d'autres missiles ... et là, soudainement, les plateaux de la balance s'équilibrent.
Il n'y a pas des agresseurs et des martyrs, mais des agressés et des attaquants, au dire même du président de la République française qui, dans une interview au Monde le 26 juillet, reconnaissait l'agresseur dans le Hezbollah. Alors quoi ? Mensonge par omission et manipulation habile de l'opinion... ?"

Paule-Henriette Lévy
"Libération", 9 août 2006

16 août 2006

« Le jour d’après » en Israël : 4000 Katiouchas, 42 civils tués

La souffrance des populations du Nord d’Israël a été clairement minimisée par les grands médias.

Il y a bien sûr une raison objective à cela : la réalité indiscutable des ravages au Liban, qui a beaucoup plus « trinqué » en matière de destructions et de victimes civiles - même si les centaines de morts libanais innocents n'étaient pas souhaités par Tsahal, contrairement aux civils tués en face (voir "post" du 11 août). Une autre raison à cette différence de traitement, souvent mise en avant par Israël et ses amis, serait la complaisance systématique de la majorité des médias occidentaux pour la partie arabe au conflit. Pour avoir pu suivre plusieurs chaînes de télévision internationales sur mon lieu de vacances, je peux attester qu’il s’agit d’une accusation que l’on aurait tort de généraliser : Paris n’est pas la France ... et la France n’est pas le Monde ! Quel que soit le contexte (conflit israélo-palestinien, guerre d’Irak, guerre avec le Hezbollah), les télés du monde entier semblent en effet « pré positionnées » selon deux grilles différentes : l’une qui garde systématiquement un équilibre (au niveau des invités, des sujets abordés, des reportages, des analyses), et j’ai apprécié ainsi la chaîne d’infos en continu britannique Skynews, la Télévision Suisse Romande ou l’américaine Fox News ; l’autre qui cherche à provoquer systématiquement de l’empathie pour la partie arabe et de l’antipathie pour Israël ou les États-Unis, et dans cette catégorie rentrent, avec du doigté CNN, et avec un cynisme abject BBC World.

Mais revenons aux chiffres du « jour d’après » donnés le 15 août par le « Haaretz » : 3.790 roquettes et missiles à moyenne portée ont été lancés par le Hezbollah, seuls 901 sont tombés en zone habitée. Ils ont tué 42 civils et blessé 4.262 autres, dont heureusement seulement 33 gravement, 2.773 étant traités pour choc. C’est la ville de Kiriat Shmona (voir mon "post" du 9 août) qui a le plus souffert, avec plus de 1000 katiouchas tombées sur la ville ou dans les environs : plus de 2000 appartements y ont été endommagés ! En recoupant d’autres infos sur le Web, j’ai relevé qu’environ 750.000 arbres avaient disparu en fumée suite aux incendies provoqués par les missiles, le désastre écologique étant le plus frappant sur les hauteurs du Mont Meron près de Safed. Au total, 10.000 logements auraient été endommagés, dont 450 maisons totalement détruites.

Pour ne pas oublier ces journées de cauchemar, un petit film pris en direct le 17 juillet après-midi dans le quartier de Bat Galim, faubourg de Haïfa : on y entend l’arrivée du missile, on y découvre avec les sauveteurs la destruction d’un immeuble, les ruines fumantes ... et les dégâts faits tout autour, notamment une auto stationnée à proximité et criblée par les billes d'acier dispersées par l'arme terroriste.

J.C
 

15 août 2006

Guerre contre le Hezbollah, guerre pour la Démocratie

Le sheikh Hassan Nasrallah, chef du Hezbollah

La traduction originale

Introduction :
Le quotidien israélien de centre-gauche « Haaretz » a publié hier 14 août, date d’entrée en vigueur du cessez-le feu, un éditorial remarquable qui remet en perspective la guerre très dure engagée contre le Hezbollah. Il est difficile de dire de façon aussi concise des vérités aussi fondamentales, aussi ai-je voulu vous donner la traduction de la plus grande partie de ce texte. Le titre du post est de moi, car je l’ai trouvé plus explicite que celui de la version anglaise de l’éditorial (« Where is the justice ? »).
J.C

« Hassan Nasrallah - qui considère que Nahariya, Haïfa et Carmiel sont des « implantations » - est un homme qui n’accepte aucun compromis. Il représente les extrémistes islamistes, pour qui la simple existence d’Israël est une épine dans leur pied. Le fait que les citoyens chiites du Liban aient élu en masse des députés Hezbollah, ou que son parti siège au gouvernement, n’augure rien de bon pour la région, ceci s’ajoutant au succès du Hamas lors des élections de l’Autorité Palestinienne. On peut discuter à propos des explications pour ces succès électoraux, mais dans tous les cas ce sont des résultats chargés de menaces.

Considérer le Hezbollah comme rien de plus qu’un parti comme le Shas (1), surgi pour le bien être des Chiites et leur fournissant des services en matière d’éducation et de santé, c’est faire preuve d’une forme dangereuse d’aveuglement. Cet aveuglement rend incapable ceux qui en sont affligés de voir l’existence d’un problème international - celui d’un Islam armé et terroriste, opérant aux frontières du Liban avec la même détermination qu’il opère sur les routes aériennes menant à l’Amérique. Ceci est clairement une menace pour le monde libre - et il ne s’agit pas ici de la démagogie de politiciens conservateurs américains.

La politique israélienne doit être clairement positionnée sur cette ligne. L’Islam extrémiste trouve son avantage dans la Démocratie et son esprit de liberté et d’ouverture, pour s’installer dans des pays et les utiliser pour ses activités anti-démocratiques et terroristes. Le monde libre a « bandé ses muscles » de façon unitaire contre ce dangereux phénomène, pas pour combattre les Musulmans, mais pour défendre ses valeurs et sa survie. En conséquence, la guerre contre le Hezbollah n’est ni un conflit territorial, ni une guerre faite pour l’administration Bush, mais une guerre au nom de la démocratie. Dans cette guerre, on peut débattre des tactiques et des choix des cibles, mais il est difficile de discuter de son caractère juste ».

Extrait de l’éditorial du Haaretz, 14 août 2006
Traduction : Jean Corcos

(1) Shas : parti politique religieux israélien

14 août 2006

We will win


"Nous allons gagner" ... trois "w" qui réunis constituent une étoile de David. Ainsi se présente le logo que m'a envoyé hier Ram Zenit, qui a donné pendant un mois aux lecteurs du Blog Politique Arabe de la France ("PAF", en lien permanent), des informations très aigues sur le développement de la guerre entre Israël et le Hezbollah. Officier de réserve de TSAHAL, expert en stratégie, il a apporté des éclairages originaux sur le développement du conflit, et je pense en particulier à son post en lien "Jusqu'au Litani : le début de la fin pour le Hezbollah au Sud Liban" ; il y explique (ce qui n'était pas évident à comprendre), que la grande offensive israélienne ne pouvait se déclencher qu'après l'accord politique obtenu pour la résolution du Conseil de Sécurité de l'ONU, les mouvements diplomatiques et militaires dépendant l'un de l'autre !
Reste que le Hezbollah, dirigé par un retors vicieux et sans doutes très bien conseillé par les "diaboliques" de Téhéran, risque d'être aussi coriace "en temps de Paix" qu'au cours de sa guerre totale contre Israël. Déjà, des commentateurs mettent le doigt sur les faiblesses de la résolution n°1701 et sur les possibilités pour la milice chiite d'en exploiter les failles, alors que je vous donnais samedi soir le lien vers un article du "Jerusalem Post" assez optimiste. De même, la résistance du Hezbollah qui s'était enterré depuis 6 ans dans l'attente de cette guerre, son armement redoutable qui a causé d'énormes dégats matériels et des pertes militaires importantes, ont causé un traumatisme en Israël, certains se demandant même si il n'aurait pas mieux valu éviter de riposter après l'agression du 12 juillet. Le général Yossi Kuperwasser, ancien responsable des renseignements militaires, dresse dans l'article en lien la liste des résultats obtenus après cette guerre d'un mois : un message d'avertissement envoyé à toute la mouvance terroriste qui sait que le prix à payer serait très lourd à l'avenir ; la démonstration que la société israélienne, occidentale et édoniste, ne peut être brisée même si les civils sont frappés (la résistance aux attentats suicides palestiniens l'avait du reste déjà démontré) ; la fin de la force de dissuasion du Hezbollah, qui a du puiser dans son arsenal (et en perdre une bonne partie) ; la démonstration que la Syrie avait lourdement armé une organisation terroriste - et que la Russie avait été irresponsable en lui livrant des armes ultra-modernes ; la mise au grand jour de la volonté génocidaire des islamistes, qui revendiquent fièrement des bombardements meurtriers ; et enfin, la nécessité pour la communauté internationale de faire appliquer les résolutions de l'ONU relatives au Liban.
Reste aussi que, et même si Israël n'a d'autre choix que de gagner cette guerre (et les prochaines qui s'annoncent, hélas ...), le prix à payer est terrible quand on pense aux jeunes appelés ou réservistes qui se sont sacrifiés pour leur pays. L'émotion a été très forte dans la communauté juive de France à l'annonce de la mort au combat de trois jeunes franco-israéliens. Je pense aussi à la disparition samedi dernier au Liban de Ouri Grossman, le fils du romancier pacifiste israélien David Grossman, qui avait signé jeudi dernier un appel à la fin des hostilités avec les deux autres romanciers les plus célèbres du pays, Amos Oz et A.B. Yehoshua (j'avais eu le plaisir d'avoir ce dernier, qui est francophone, comme invité à mon émission). Le site Internet du "Yediot Aharonot" consacre une page à cette disparition, et je dois avouer que je la trouve particulièrement injuste : David Grossman avait acquis une célébrité internationale en dénonçant l'occupation des Territoires palestiniens ; mais cet homme de dialogue, qui restait lucide sur le fanatisme arabe, avait dit plus tard dans une interview publiée en pleine vague terroriste qu'il interdisait à ses enfants de prendre le même autobus, de peur qu'ils ne périssent ensemble dans le même attentat. Ce fut un Chiite libanais qui tira le missile tueur sur le blindé du jeune Ouri qui allait fêter dans deux semaines ses 21 ans - et pas un Sunnite palestinien préparé au "martyre" par le Hamas ... 
J.C

13 août 2006

Jolie photo pour mollahs machos !

Tsipi Livni et Condoleeza Rice

J'adore cette photo, prise il y a peu à Jérusalem, des deux Ministres des Affaires Etrangères, l'israélienne Tsipi Livni et l'américaine Condoleeza Rice ... D'abord, pourquoi ne pas l'avouer, parce qu'il n'est pas désagréable de voir - même à l'occasion d'une crise grave et douloureuse comme celle que vient de connaître le Proche-Orient - deux femmes encore jeunes (48 ans pour la première, la petite cinquantaine pour la deuxième), et au sourire charmeur. J'ai trouvé cette photo sur un blog (http://israelpolitique.over-blog.com) dont le rédacteur doit être un admirateur inconditionnel de la responsable de la diplomatie israélienne ... difficile de trouver sur la Toile une collection aussi complète de ses photos !

Mais il y a aussi deux autres raisons, la première simple à comprendre, la deuxième un peu plus subtile et que je trouve bien réjouissante. Bien sûr, cette poignée de mains illustre l'alliance israélo-américaine, cette alliance avec la plus grande puissance du Monde qui agace tellement dans notre pays - même lorsque, et il faut aussi s'en féliciter, le Quai d'Orsay arrive à travailler de concert avec les USA comme ce fut le cas pour le vote de la résolution 1701 du Conseil de Sécurité.
Mais surtout, je vois cette photo comme un formidable pied de nez fait à Nasrallah, ce pantin à turban et barbe de fanatique qui jouait les terreurs sur Al-Manar, et à ses parrains iraniens moyenâgeux, racistes, antisémites et surtout machos. Car ce sont deux femmes, l'une juive et l'autre afro-américaine, qui ont discuté ensemble de la meilleure manière de leur faire mordre la poussière !

J.C

12 août 2006

La résolution 1701 du Conseil de Sécurité de l'ONU : texte intégral, désinformation et analyse

Introduction :
Ouf ... ça y est, le Conseil de Sécurité de l'ONU vient de voter, à l'unanimité, une résolution pour mettre un terme à la guerre entre Israël et le Hezbollah ; et surtout, prendre des dispositions pour qu'elle ne recommence pas, avec l'envoi d'une force multinationale de 15.000 hommes et la demande explicite d'évacuation du Sud Liban par la milice chiite, en parallèle à l'évacuation des troupes israéliennes. Ci-dessous la traduction intégrale du texte en anglais de la résolution n° 1701, publiée ce matin par le journal "Le Figaro".
J.C

«Le Conseil de sécurité,

Rappelant toutes ses résolutions précédentes relatives au Liban, en particulier les résolutions 425 et 426 (1978), 520 (1982), 1559 (2004), 1655 (2006) et 1680 (2006), ainsi que les déclarations de son Président touchant la situation au Liban, en particulier les déclarations des 18 juin 2000, 19 octobre 2004, 4 mai 2005, 23 janvier 2006 et 30 juillet 2006,

Se déclarant extrêmement préoccupé par la poursuite de l'escalade des hostilités engagées au Liban et en Israël depuis l'attaque du Hezbollah en Israël le 12 juillet 2006, qui ont déjà fait des centaines de morts et de blessés des deux côtés, cause des dégâts considérables aux infrastructures civiles et contraint des centaines de milliers de personnes a se déplacer à l'intérieur de leur pays,

Soulignant que la violence doit cesser et soulignant dans le même temps qu'il faut remédier d'urgence aux causes qui ont donné naissance à la crise actuelle, notamment en obtenant la libération inconditionnelle des soldats israéliens enlevés,

Conscient du caractère délicat de la question des prisonniers et encourageant les efforts visant à régler d'urgence la question des prisonniers libanais détenus en Israël,

Se félicitant des efforts du premier ministre libanais et de l'engagement pris par le Gouvernement libanais, dans son plan en sept points, d'étendre son autorité sur son territoire, par l'intermédiaire de ses propres forces armées légitimes, de sorte qu'aucune arme ne s'y trouve sans le consentement du Gouvernement libanais et qu'aucune autorité ne s'y exerce autre que celle du Gouvernement libanais, se félicitant également de son engagement vis-à-vis d'une force des Nations unies dont les effectifs, le matériel, le mandat et le champ des opérations seront complétés et renforcés, et ayant à l'esprit sa demande, formulée dans ce plan, de retrait immédiat des forces israéliennes du Sud-Liban,

Déterminé à agir de telle sorte que ce retrait intervienne le plus tôt possible,

Prenant dûment note des propositions faites dans le plan en sept points concernant le secteur des fermes de Chebaa,

Se félicitant de la décision unanime prise par le Gouvernement libanais le 7 août 2006 de déployer une force armée libanaise de 15.000 hommes au Sud-Liban en même temps que l'armée israélienne se retire en deçà de la Ligne bleue et de demander l'assistance de forces supplémentaires de la Force intérimaire des Nations unies au Liban (Finul), selon que de besoin, pour faciliter l'entrée des forces armées libanaises dans la région, et de réaffirmer son intention de renforcer les forces armées libanaises en les dotant du matériel nécessaire pour leur permettre de s'acquitter de leurs tâches,

Conscient de la responsabilité qui lui incombe d'aider à garantir un cessez-le feu permanent et une solution a long terme au conflit,

Considérant que la situation au Liban constitue une menace à la paix et à la sécurité internationales,

1. Lance un appel en faveur d'une cessation totale des hostilités fondée, en particulier, sur la cessation immédiate par le Hezbollah de toutes les attaques et la cessation immédiate par Israël de toutes les offensives militaires;

2. Dès la cessation totale des hostilités, demande au Gouvernement libanais et à la Finul, comme elle y est autorisée par le paragraphe 11, de déployer leurs forces ensemble dans tout le Sud, et demande au Gouvernement israélien, alors que ce déploiement commence, de retirer en parallèle toutes ses forces du Sud-Liban;

3. Souligne qu'il importe que le Gouvernement libanais étende son autorité à l'ensemble du territoire libanais, conformément aux dispositions des résolutions 1559 (2004) et 1680 (2006), et aux dispositions pertinentes des Accords de Taëf, afin d'y exercer intégralement sa souveraineté, de sorte qu'aucune arme ne s'y trouve sans le consentement du Gouvernement libanais et qu'aucune autorité ne s'y exerce autre que celle du Gouvernement libanais;

4. Réaffirme son ferme appui en faveur du strict respect de la Ligne bleue;

5. Réaffirme également son ferme attachement, comme il l'a rappelé dans toutes ses résolutions précédentes sur la question, a l'intégrité territoriale, à la souveraineté et à l'indépendance politique du Liban à l'intérieur de ses frontières internationalement reconnues, comme prévu dans l'Accord général d'armistice israélo-libanais du 23 mars 1949;

6. Demande à la communauté internationale de prendre des mesures immédiates pour prêter son concours financier et humanitaire au peuple libanais, notamment en facilitant le retour en toute sécurité des personnes déplacées et en rouvrant les aéroports et les ports sous l'autorité du Gouvernement libanais, conformément aux paragraphes 14 et 15, et lui demande également de fournir dans l'avenir une aide à la reconstruction et au développement du Liban;
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7. Affirme que toutes les parties sont tenues de veiller à ce que ne soit menée aucune action, contraire au paragraphe 1, qui pourrait être préjudiciable à la recherche d'une solution à long terme, à l'accès de l'aide humanitaire aux populations civiles, notamment au passage en toute sécurité des convois humanitaires, au retour volontaire et dans la sécurité des personnes déplacées, et demande à toutes les parties de s'acquitter de cette responsabilité et de coopérer avec le Conseil de sécurité;

8. Lance un appel à Israël et au Liban pour qu'ils appuient un cessez-le-feu permanent et une solution à long terme fondés sur les principes et éléments suivants:

-Strict respect par les deux parties de la Ligne bleue;

-Adoption d'un dispositif de sécurité qui empêche la reprise des hostilités, notamment établissement, entre la Ligne bleue et le Litani, d'une zone d'exclusion de tous personnels armés, biens et armes autres que ceux déployés dans la zone par le Gouvernement libanais et les forces de la Finul autorisées en vertu du paragraphe 11;

-Application intégrale des dispositions pertinentes des Accords de Taëf et des résolutions 1559 (2004) et 1680 (2006) qui exigent le désarmement de tous les groupes armés au Liban, afin que, conformément a la décision du Gouvernement libanais du 27 juillet 2006, seul l'Etat libanais sera autorisé à détenir des armes et à exercer son autorité au Liban;

-Exclusion de toute force étrangère au Liban sans le consentement du Gouvernement libanais;

-Exclusion de toute vente ou fourniture d'armes et de matériels connexes au Liban, sauf celles autorisées par le Gouvernement libanais;

-Communication à l'Onu des cartes des mines terrestres posées au Liban encore en la possession d'Israël;

9. Invite le Secrétaire général à appuyer les efforts visant à obtenir dès que possible des accords de principe de la part du Gouvernement libanais et du Gouvernement israélien concernant les principes et éléments en vue d'une solution à long terme tels qu'énoncés au paragraphe 8, et exprime son intention de rester activement engagé;

10. Prie le Secrétaire général de mettre au point, en liaison avec les acteurs internationaux clefs et les parties intéressées, des propositions pour mettre en oeuvre les dispositions pertinentes des Accords de Taëf et des résolutions 1559 (2004) et 1680 (2006), notamment de celles relatives au désarmement, et pour délimiter les frontières internationales du Liban, en particulier dans les zones où la frontière est contestée ou incertaine, y compris en s'occupant de la question des fermes de Chebaa, et de les lui présenter dans les 30 jours;

11. Décide, en vue de compléter et renforcer les effectifs, le matériel, le mandat et le champ d'opérations de la Finul, d'autoriser un accroissement des effectifs de celle-ci pour les porter a un maximum de 15.000 hommes, et décide que la Force devra, en sus de l'exécution de son mandat au titre des résolutions 425 et 426 (1978):

-a) Contrôler la cessation des hostilités;

-b) Accompagner et appuyer les forces armées libanaises à mesure de leur déploiement dans tout le Sud, y compris le long de la Ligne bleue, pendant qu'Israël retire ses forces armées du Liban comme il est prévu au paragraphe 2;

-c) Coordonner ses activités relatives a l'exécution du paragraphe 11 b) avec les gouvernements libanais et israélien;

-d) Fournir son assistance pour aider à assurer un accès humanitaire aux populations civiles et le retour volontaire des personnes déplacées dans des conditions de sécurité;

-e) Aider les forces armées libanaises à prendre des mesures en vue de l'établissement de la zone mentionnée au paragraphe 8;

-f) Aider, sur sa demande, le Gouvernement libanais à donner effet au paragraphe 14;

12. Agissant à l'appui d'une demande du Gouvernement libanais tendant à ce qu'une force internationale soit déployée pour l'aider à exercer son autorité sur l'ensemble du territoire, autorise Ia Finul à prendre toutes les mesures nécessaires dans les secteurs où ses forces sont déployées et, quand elle le juge possible dans les limites de ses capacités, de veiller à ce que son théâtre d'opération ne soit pas utilisé pour des activités hostiles de quelle que nature que ce soit, de résister aux tentatives visant à l'empêcher par la force de s'acquitter de ses obligations dans le cadre du mandat que lui a confié le Conseil de sécurité, et de protéger le personnel, les locaux, les installations et le matériel des Nations unies, d'assurer la sécurité et la liberté de mouvement du personnel des Nations unies et des travailleurs humanitaires et, sans préjudice de la responsabilité du Gouvernement libanais, de protéger les civils exposés a une menace imminente de violences physiques;

13. Prie le Secrétaire général de mettre d'urgence en place des mesures de nature à garantir que la Finul est à même de s'acquitter des fonctions envisagées dans la présente résolution, exhorte les Etats membres à envisager d'apporter des contributions appropriées a la Finul et de répondre de manière positive aux demandes d'assistance de la Force, et exprime sa vive gratitude à ceux d'entre eux qui ont contribué a la Finul par le passé;

14. Demande au Gouvernement libanais de sécuriser ses frontières et les autres points d'entrée de manière à empêcher l'entrée au Liban sans son consentement d'armes ou de matériel connexe et prie la Finul, comme elle y est autorisée au paragraphe 11, de prêter assistance au Gouvernement libanais sur sa demande;

15. Décide en outre que tous les Etats devront prendre toutes les mesures nécessaires pour empêcher, de la part de leurs ressortissants ou à partir de leurs territoires ou au moyen de navires de leur pavillon ou d'aéronefs de leur nationalité,

-a) La vente ou la fourniture à toute entité ou individu situé au Liban d'armes et de matériel connexe de tous types, y compris les armes et leurs munitions, les véhicules et le matériel militaires, le matériel paramilitaire et leurs pièces de rechange, que ce matériel provienne ou non de leur territoire, et

-b) La fourniture à toute entité ou individu situé au Liban de toute formation ou moyen technique lié à la fourniture, à la fabrication, à l'entretien ou à l'utilisation des matériels énumérés au paragraphe a) ci-dessus, étant entendu que ces interdictions ne s'appliqueront pas aux armes, au matériel connexe, aux activités de formation ou à l'assistance autorisés par le Gouvernement libanais ou par la Finul, comme elle y est autorisée au paragraphe 11;

16. Décide de proroger le mandat de la Finul jusqu'au 31 août 2007, et exprime son intention d'envisager dans une résolution ultérieure un nouveau renforcement de son mandat et d'autres mesures visant à contribuer à la mise en oeuvre d'un cessez-le-feu permanent et d'une solution à long terme;

17. Prie le Secrétaire général de lui rendre compte dans une semaine au plus tard, puis à intervalles réguliers, de l'application de la présente résolution;

18. Souligne qu'il importe et qu'il est nécessaire d'instaurer une paix globale, juste et durable au Moyen-Orient, sur la base de toutes ses résolutions pertinentes, y compris ses résolutions 242 (1967) du 22 novembre 1967, 338 (1973) du 22 octobre 1973 et 1515 (2003) du 19 novembre 2003;

19. Décide de rester activement saisi de la question.

A noter que la désinformation, encore et toujours, fait des ravages sur nos chaînes de télévision, France 2 et I-télé ont par exemple, présenté un résumé tronqué de cette résolution, "oubliant les exigences : de désarmement du Hezbollah ; d'embargo sur les armes non destinées au gouvernement libanais. Dans ces conditions, le correspondant de la chaîne de télévision publique à Beyrouth peut effectivement parler de "victoire totale" pour le Hezbollah.

Pour une interprétation plus en profondeur de ce long texte voté par le Conseil de Sécurité, on lira la magistrale analyse de Barry Rubin dans l'édition Internet du "Jerusalem Post" (en langue anglaise). "Not so bad in theory" tel est le titre de l'article ... les différents paragraphes favorables à Israël et ceux en apparence favorables au Liban, y sont méticuleusement commentés. Reste l'application sur le terrain, et là les choses se compliquent, Barry Rubin expliquant que le Hezbollah peut choisir plusieurs "profils" pour s'adapter à la situation - et cela sous le regard de l'UNIFIL, dont le mandat aurait gagné à être plus clair !

J.C